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Chine : des choix utiles pour l’économie mondiale
Par Jean-Claude Delaunay

Les événements récents confirment le besoin de la Chine de développer son marché intérieur tout en continuant à exporter. Néanmoins, d’autres aspects sont apparus depuis juin dernier dans la situation de l’économie chinoise. En juin, les principaux aspects de la crise de cette économie étaient l’inflation, des problèmes d’approvisionnement alimentaire, la croissance des inégalités régionales.

Les deux premiers problèmes sont résolus, mais le troisième, considérable, subsiste, alors même que le pays est entré dans une nouvelle phase de difficultés. Le système bancaire chinois a été moins touché que celui d’autres pays, la crise de l’économie chinoise n’est donc pas de nature financière. Elle est principalement économique. Les exportations représentent environ 30 % de la richesse annuelle de ce pays. On comprend donc que, les marchés extérieurs se fermant, l’ensemble de l’économie (avec une forte dimension régionale) subisse de lourdes pertes. Il en résulte une crise sociale dans la mesure où la main-d’oeuvre, d’origine rurale, perd son emploi et « retourne au pays », mais sans ressources. Le programme de soutien à l’économie adopté en novembre, de 460 milliards d’euros, rassemble des dispositifs antérieurs, mais en ajoute de nouveaux. Ce plan vise à contrecarrer les effets de la crise en cours tout en réorientant l’économie selon une quadruple direction : plus de compétences intellectuelles et de recherches, plus de sécurité sociale, plus de préoccupations écologiques, moins de disparités entre les régions. Il y aurait beaucoup à dire sur ces mesures, qui sont étendues et précisées chaque jour. Elles ont et auront une incidence favorable sur l’économie chinoise et sur les autres économies.

Selon moi, la société chinoise est une société socialiste, non seulement dans ses textes fondamentaux, mais dans les aspects essentiels de sa pratique politique. Je sais que ce point est très controversé et que divers problèmes peuvent être soulevés. Je peux donc me tromper.
Mais j’ai totalement confiance dans le débat, s’il est conduit de façon scientifique. À cet égard, je considère que les communistes doivent s’emparer de cette question théorique de première grandeur et ne pas laisser à d’autres le soin de décider de leur interprétation de la Chine moderne. Au plan politique, en effet, ce pays représente la forme la plus antagonique du système capitaliste qui puisse exister. Mais la Chine est aussi un pays en développement. Partie d’un très bas niveau, elle est devenue, avec l’ouverture économique (1978), complémentaire du capitalisme. Il existe donc une opposition de principe (au plan politique) et une unité de fait (au plan économique) entre la Chine et le système capitaliste.

La question est de savoir comment fonctionne cette contradiction (opposition et unité) dans le contexte de la crise en cours. Le moment unitaire de cette contradiction est évident.

La réunion du G20 en a fourni un témoignage. Notons que la Chine fut alors le seul grand pays à apporter, avec le plan de relance évoqué ci-dessus, une contribution effective au soutien de l’emploi mondial. Cela dit, la Chine n’est pas, en 2008, aussi dominée par les puissances capitalistes qu’elle pouvait l’être trente ans plus tôt. D’une part, elle consolide sa légitimité internationale en réglant pacifiquement ses contentieux. Elle développe une politique active de coopération dans le monde. D’autre part, elle est en mesure de construire une économie moderne. La Chine apparaît donc comme un rival d’autant plus dangereux que son orientation politique est socialiste.

C’est dans ce contexte qu’il convient d’interpréter les provocations en faveur du dalaï-lama - vingt-cinquième réincarnation de Bouddha -, et de ses aspirations à la puissance terrestre. Persuadé de poursuivre un destin de grand homme, le président de notre République maltraitée a cru intelligent de se situer aux deux bouts de la contradiction matérialisée par la Chine, en lui vendant des matériels (unité économique) mais en cherchant simultanément à lui nuire politiquement (opposition politique).
Le présumé grand homme s’est seulement fait taper sur le nez, comme un garnement. Bien que de peu d’importance, cet incident est significatif du fonctionnement de la contradiction dans laquelle la société chinoise est impliquée au plan mondial. Pour réduire le plus possible les tensions politiques résultant du caractère socialiste de la société et de ses performances dans un monde perturbé, le gouvernement chinois intervient activement au plan économique pour limiter les crises du capitalisme, porteuses de conflits. Mais, ce faisant, les maîtres du monde prennent conscience que leur système est de moins en moins efficient. D’où la mise en place d’un double jeu de séduction économique et de harcèlement politique de la puissance chinoise, jeu dont le Tibet est l’une des pièces. Il nous revient de ne pas laisser la Chine seule dans cet affrontement et, a fortiori, de ne pas ajouter le poids de nos incompréhensions à la lutte sans merci que lui mènent les dirigeants capitalistes.

Article paru dans l’Humanité du 31 décembre 2008


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