Comment un accident pétrolier dans le golfe du Mexique, a-t-il pu se transformer en désastre, aux incalculables conséquences humaines, écologiques, financières et industrielles, tout particulièrement pour la Louisiane ?
Sans attendre que les responsabilités soient établies un jour, certains des ingrédients qui ont contribué à ce désastre, apparaissent déjà.
1°) Surdépendance des Etats-Unis au pétrole
La cause première de cette catastrophe découle du mode de vie des américains et de « leur insatiable appétit pour le pétrole », dont ils consomment près de 900 millions de tonnes chaque année, importés à près de 65%. [1]
« L’administration américaine considère que la production pétrolière du golfe du Mexique, qui assure le 1/3 de la production nationale et 10% de la consommation nationale, est vitale à la sécurité économique et énergétique du pays. » [2].
2°) Sous-estimation des risques
Alors que l’exploitation du pétrole en eau profonde (Deepwater) présente des difficultés inouïes, les analyses réalisées, tant par les industriels [3] que par l’administration américaine [4] , ont conclu étonnamment à la maîtrise des risques et à la très faible probabilité d’occurrence d’un accident industriel majeur, susceptible d’entraîner une grave marée noire dans le golfe du Mexique.
Le PDG de BP déplore aujourd’hui : "L’industrie et le gouvernement n’ont pas anticipé ce type d’accident, dans lequel tous les mécanismes de sécurité ont échoué ". [5]
3°) Communication lénifiante des entreprises pétrolières
Le discours toujours plus « vert » des entreprises pétrolières, contribue à anesthésier l’esprit critique de l’opinion publique et des médias :
« Des opérations sûres et fiables sont le secret du succès de BP, et nous nous efforçons d’améliorer en permanence notre sécurité. » [6]
« Nous nous imposons de protéger, partout où nous opérons, les écosystèmes et les espèces qui y vivent. » [7]
4°) Pression des actionnaires
« L’entreprise est aussi sous pression des actionnaires. Il faut du rendement, de la productivité, une rentabilité du capital investi suffisante », exigences souvent incompatibles avec la sécurité. [8]
5°) Limites de compétence du Politique
Le Politique est amené à prendre des décisions hors de son domaine de compétence, notamment dans les affaires complexes touchant l’énergie ou le climat.
18 jours avant la catastrophe, le président Obama affirmait, pour justifier sa décision d’élargir les zones de forage en mer : « Les plateformes, aujourd’hui, ne causent généralement plus de marée noire. La technologie est très assurée. ».
38 jours après l’accident, le même Président déplorait : « Là où j’ai eu tort, cela a été de croire que les compagnies pétrolières savaient ce qu’elles faisaient en matière de scénario du pire ». [9]
Toutes les leçons du désastre seront-elles tirées ?
Source : liste de diffusion RACF
Sur ce sujet, voir également un texte de l’association COMAGUER, publié sur le site du Comité Valmy :
http://www.comite-valmy.org/spip.php?article658
[1] Don’t blame BP – Gulf of Mexico oil spill is America’s fault. J. Warner. Telegraph. 28/05/2010. http://www.telegraph.co.uk/finance/comment/jeremy-warner/7779914/Dont-blame-BP-Gulf-of-Mexico-oil-spill-is Americas-fault.html
[2] Fact sheet regarding Halt on permits to Drill New Wells. Mays 17, 2010 MMS. http://www.mms.gov/ooc/pdfs/DOI_pressrelease/FactSheetonOCSOperations.pdf
[3] Major Accident Hazard Risk Assessment. Deepwater Horizon. 29/08/2004. Transocean.http://energycommerce.house.gov/documents/20100512/TRO-Major.Accident.Hazard.Risk.Analysis.Deepwater.Horizon.August.2004.pdf
[4] Comparative Risk Analysis for Deepwater production Systems. MMS. January 2001. http://www.gomr.mms.gov/homepg/offshore/fpso/final_report.pdf
[5] BP veut revoir ses procédures et améliorer la sécurité des puits. 04/06/2010. Reuters. http://blogs.lesechos.fr/article.php?id_article=4028
[6] BP . Safe and reliable operations are integral to BP’s success, and we strive continuously to improve our safety performance. http://www.bp.com/subsection.do?categoryId=2317&contentId=7060028 BP : nos engagements pour le respect de l’environnement. http://www.bp.com/genericarticle.do?categoryId=4003291&contentId=7016031
[7] Total. Protéger la biodiversité. http://www.total.com/fr/nos-enjeux/respecter-l-environnement/maitriser-nos-impacts-locaux-sur-l-environnement/biodiversite-200695.html#
[8] BP, un aventurier en eaux profondes. P. Escande. Les Echos. 26/05/2010. http://blogs.lesechos.fr/article.php?id_article=4028
[9] Marée noire : Barack Obama fait amende honorable. C. Lesnes. Le Monde. 29/05/2010.