Avant d’avoir lu « Au fil de Creil », on n’a pas idée de tout ce qu’il peut se passer dans cette ville que caresse l’Oise, et quand Philippe Lacoche s’y intéresse de près, c’est pour nous en sortir neuf nouvelles. Neuf nouvelles déjantées, dans lesquelles il est question d’une confrérie de la tarte au clou, d’un guitariste ambitieux dont le groupe s’appelle Délicieuses Ordures, d’une certaine prunelle, brune incendiaire, qui, souhaitant séduire Abdul l’afghan, demande à un menuisier de lui fabriquer un soutien-gorge en bois. Et puis deux types qui ambitionnent d’enlever Albert Jacquard, parce que c’est plus facile qu’un David Douillet, un qu’un Mélenchon dont la nervosité les effraie. Après avoir organisé un kidnapping foireux, ils finiront, désabusés, par ouvrir une société de livraison de pizzas.
On y rencontre aussi des retraités qui, balançant leurs effluves de parfum Yves Rocher dans les airs, dansent furieusement sur des titres aussi improbables que la « Chenille » et « A whiterShade of Pale » de ProcolHarum .Mais rassurez-vous, quelques pages plus loin, le fibre rock de Lacoche nous revient en pleine face avec les Stones, Can et leur mythique « Shebrings the rain »chanté par l’incroyable Malcolm Mooney, les sons electro-planants des Tangerine Dream ainsi que tous ces groupes qui font l’incommensurable culture musicale de cet excellent noveliste Picard déluré.
Et puis lire Lacoche c’est aussi le plaisir de savourer des petites phrases comme « une lumière tendre enduisait la ville d’une lumière crémeuse »…
A lire et à offrir sans attendre…
Philippe Lacoche Au fil de Creil Editions du Castor Astral