...J’ai déjà cité plus haut les ouvrages importants de Sartre dans lesquels il se réclame de la phénoménologie (avant de l’abandonner) et dont il pratique la méthode d’étude des faits de conscience, avec un talent incontestable. Mais ce qu’il faut dégager maintenant, dans le prolongement de qui précède, c’est l’ontologie que cette approche implique, de type idéaliste là aussi et qui est clairement présente comme telle, même s’il paraît le dénier.
Lui aussi part de la conscience posée comme une instance originelle et absolue, même si elle n’existe qu’en rapport avec un monde qui lui est extérieur mais qui n’existe lui-même que relativement à elle qui le vise. C’est ainsi que, commentant la thèse de l’intentionnalité de la conscience selon Husserl dans Situations I, il affirme : « La conscience et le monde sont donnés d’un même coup : extérieur par essence à la conscience, le monde est, par essence, relatif à lui. » [1] On laissera de côté le statut de ce monde qui ne semble pas doté d’une aséité comme le voudrait un réalisme matérialiste qu’il récuse ici, mais aussi un peu plus tard dans un chapitre de Situations III, truffé de sophismes et plutôt désolant [2], et j’en viens donc au statut ontologique de cette conscience. En dehors de La transcendance de l’ego, dont le titre dit tout, c’est dans L’être et le néant qu’il le formule le plus explicitement, sur le terrain qui est encore le sien, celui de la phénoménologie : « La conscience est son propre fondement » (souligné par moi), en tant que « pour-soi » donc, et elle est confrontée à sa propre facticité incompréhensible : « Il reste contingent qu’il y ait une conscience plutôt que du simple en-soi à l’infini ». Et il insiste : « L’évènement absolu ou pour-soi est contingent en son être même. » [3] Mais cela ne suffit pas pour la caractériser dans ce que ce statut implique, à savoir la liberté absolue, de type métaphysique, de cette conscience, de ses actes intentionnels et des comportements qu’ils induisent, donc celle de l’homme et c’est en se sens que la conscience n’est pas seulement originelle – à l’origine de soi, si l’on peut dire, auto-donnée à elle-même ou encore ontologiquement première – mais aussi originaire, à l’origine de ce qu’elle fait, donc de ses choix constants dans ce quelle est et les comportements qui s’ensuivent. C’est bien pourquoi elle n’a pas d’être, qu’elle est « néant », car un être déterminé la déterminerait et la priverait de sa liberté. Or il faut bien comprendre ce que cette double dimension – la conscience est originelle et originaire – implique en profondeur el la manière dont elle se manifeste.
Originelle, donc : cela signifie qu’elle échappe à tous les déterminismes extérieurs à elle, et d’abord à celui de la matière, en l’occurrence de la biologie, donc du cerveau. C’est dans son texte de Situations III, déjà signalé, qu’il est le plus explicite à ce niveau, s’en prenant inconsidérément au matérialisme et visant sinon le marxisme, en tout cas le « néo-marxisme stalinien » de son temps selon lui, et c’est pourquoi, dit-il, il ne cite pas beaucoup Marx. Il reproche ainsi au matérialiste de faire de la métaphysique « lorsqu’il réduit l’esprit à la matière » et il lui renvoie ironiquement la formule de Hegel selon laquelle, dans ce cas, l’esprit serait « un os » [4]. Or il faut le dire vivement, malgré le talent littéraire et polémique avec laquelle il la formule, cette position anti-matérialiste est une aberration au regard de la science biologique contemporaine, théorie de l’évolution incluse, et si j’y insiste une nouvelle fois, c’est qu’elle traduit bien l’idéalisme dominant encore au 20ème siècle et son inexcusable déni des sciences positives qui engendre ce que Granel, penseur d’une rare honnêteté, a pu appeler une « paranoïa théorique », expression qui, si elle visait Husserl, s’applique bien à Sartre. Disons alors que, dans ce domaine précis, Sartre est victime d’un spiritualisme anti-scientifique et spéculatif, surdéterminé au surplus, à l’époque où il a écrit ce texte, par une motivation politique : son hostilité non au communisme en tant que tel, mais en tout cas au stalinisme, attitude qu’il a dépassée ensuite mais qui apparaît dans ce pamphlet (car c’est un pamphlet). Et j’ajoute, vu l’hostilité de Sartre au spiritualisme officiel en raison de son ascendance religieuse, que cette accusation de spiritualisme pourra choquer et sembler paradoxale étant donné l’essence de la conscience par ailleurs, dont la définition est empruntée à Husserl et dont j’ai indiqué qu’il l’avait très bien analysée : pur « rapport à », non substantielle donc, ouverture, vide et finalement « néant d’être » – on est loin de ce qu’on a appelé traditionnellement l’« esprit ». Il n’empêche : le spiritualisme a plusieurs « tours dans son sac », dont celui de Sartre est sans doute le dernier, à ce niveau de conceptualisation et malgré ses impasses !
Une conscience originaire ensuite, non soumise aux déterminismes multiples qui pourtant, nous le savons de science sûre et il pouvait le savoir dès son temps, pèsent sur elle. Le déterminisme biologique, on l’a vu et dont la science ne cesse d’approfondir le poids sur l’homme à un certain niveau, quitte à intégrer l’influence du milieu sur la biologie elle-même [5]. Mais il y a surtout l’ignorance grave du déterminisme psychologique qui pèse sur chacun d’entre nous dés lors qu’on admet, et on doit l’admettre, l’existence d’un psychisme inconscient tel que Freud nous en a révélé scientifiquement l’existence. Ce déterminisme traverse la conscience elle-même et pèse sur nos actes, générant des illusions de la conscience [6] qui non seulement nous trompent sur nous, mais nous font oublier son existence et nous font croire à notre liberté, illusion suprême dont la pensée de Sartre est victime et qu’il aura portée à son comble du fait de la radicalité de sa conception d’une conscience transparente à elle-même et libre de ses choix. Le meilleur exemple de cette illusion théorique se trouve dans son Esquisse d’une théorie des émotions [7], ouvrage dans lequel il développe avec subtilité son point de vue – mais une subtilité qui n’est appréciable que si l’on fait soi-même l’impasse sur l’inconscient psychique. C’est ainsi que pour lui il n’y a pas de conscience qui serait émue (anxieuse, en colère, etc.) mais une conscience qui, dans une situation donnée, se fait émue, choisit donc de l’être pour des motifs intentionnels dont elle a une conscience « non-réflexive » certes, comme il dit, donc peu claire, mais une conscience tout de même et qui peut devenir réflexive et accéder par soi-même à une connaissance de soi : l’irréflexion n’est en rien une inconscience et elle maintient donc notre liberté. L’exemple le plus célèbre qu’il donne de cette approche est celui, extrême, d’une femme qui s’évanouit devant un massif de lauriers. Pour un freudien, ce sont des motivations inconscientes, comme des souvenirs traumatisants associés à ce massif, mais refoulés, qui la déterminent à s’évanouir plutôt que d’affronter la situation perceptive et les souvenirs qui lui sont associés. Pour Sartre, c’est le contraire qui se passe : c’est la conscience de cette femme, même si elle n’est pas totalement transparente à soi, qui attribue un sens émouvant à la situation, qui la constitue donc comme émouvante et se fait donc elle-même émue, au point de s’évanouir. Avec ce paradoxe ultime : la conscience en arrive même à se rendre inconsciente dans l’évanouissement. En généralisant : l’homme, de par sa liberté, est responsable de ses émotions, sa conscience est à l’origine de celles-ci ! Evacué, alors, le rôle des sédimentations de l’enfance dans notre inconscient affectif qui font, par exemple, qu’un adolescent qui a été terrorisé par une autorité parentale exigeant de lui une réussite scolaire extrême, pourra être ému, voire paralysé, lors d’une épreuve où il est censé performer ! Faut-il le dire ? Ce libre arbitre psychologique est totalement mythique !
Enfin, il y a aussi le poids du déterminisme socio-historique qui n’est guère présent, voire pas du tout, chez lui, à cette époque à nouveau. C’est dans sa conférence L’existentialisme est un humanisme [8] qu’il a le plus fermement évacué le rôle des circonstances ou des conditions sur l’homme. Non qu’il nie qu’elles existent et qu’elles créent des limites à sa liberté de choix dans les moyens dont elle dispose concrètement ; mais, d’une part, il prétend que les mettre en avant c’est une manière d’excuser ses actes quand on peut les condamner, donc de se rassurer en n’assumant pas sa responsabilité – et il en donne des exemples dans l’ordre des actions politiques – et, d’autre part, il prétend aussi que l’homme peut toujours se déterminer « librement dans son existence par rapport à elles » ou à l’intérieur d’elles [9]. On est à l’opposé de Marx soutenant que « ce que sont les individus dépend des conditions matérielles de leur existence » [10], thèse largement exacte, surtout si l’on a en tête l’idée qu’à ces conditions « matérielles » s’ajoutent les conditions sociales, idéologiques et éducatives, ensemble très riche, multifactoriel, que la sociologie contemporaine, inspirée par les travaux innovants de Bourdieu, a mis en évidence et analysé de façon pointue. D’une manière plus générale, cette position « indéterministe » s’appuie sur une métaphysique de la liberté (même s’il se méfie de cette notion de « métaphysique ») qu’il a brillamment formulée en récusant à la fois l’idée de Dieu et celle de nature humaine qui lui est liée, mais, surtout, en affirmant du coup la précession de l’existence de l’homme sur son « essence », qui se réduit alors à l’ensemble de ses actes libres. Il vaut la peine de rappeler ce passage célèbre, dans lequel l’athéisme est présent, sinon présupposé [11] : « Ainsi, il n’y pas de nature humaine, puisqu’il n’y a pas de Dieu pour la concevoir. L’homme est seulement, non seulement tel qu’il se conçoit mais tel qu’il se veut, et comme il se conçoit après l’existence, comme il se veut après cet élan vers l’existence, l’homme n’est rien d’autre que ce qu’il se fait. » D’où s’ensuit, un peu plus loin, l’affirmation que « l’homme est responsable de ce qu’il est » et qu’il a « la responsabilité totale de son existence ». Terrible responsabilité, donc, mais responsabilité bien abstraite et imaginaire telle quelle, qui oblitère la « responsabilité » ou la causalité effective, celle des rapports sociaux, dans ce que sont les hommes et qui débouche donc sur un humanisme lui-même imaginaire ou rêvé philosophiquement, aux antipodes de l’humanisme pratique de Marx, qui tient compte de ce que la société fait de l’homme ! [12] Tout cela s’inscrit dans une dévalorisation du matérialisme inhérente à la phénoménologie, par définition on l’aura compris, mais qui s’exprime chez lui sous une forme qui est inacceptable à la fois théoriquement et pratiquement ou moralement. Je cite : « Cette théorie (= l’existentialisme – Y. Q.) est la seule à donner une dignité à l’homme, c’est la seule qui n’en fasse pas un objet. Tout matérialisme a pour effet de traiter tous les hommes y compris soi-même comme des objets, c’est-à-dire comme un ensemble de réactions déterminées, que rien ne distingue de l’ensemble des qualités et des phénomènes qui constituent une table, une chaise ou une pierre. » [13] Je vais être franc avec le lecteur : ce passage est hallucinant à la fois d’ignorance quant à la tradition matérialiste, d’ignorance scientifique dans le domaine anthropologique et d’incompréhension philosophique. La première ignorance tient à ce qu’il n’a pas lu (ou alors il est victime d’un oubli), à nouveau, le Marx des Manuscrits de 1844 qui critique l’aliénation en régime capitaliste, laquelle empêche l’homme de réaliser sa « nature » au sens des capacités naturelles qu’il lui attribue, et qu’il souhaite voir abolie à travers le communisme, ce qui lui permet d’affirmer : « Ce communisme en tant que naturalisme achevé = humanisme » [14]. Et cette affirmation s’accompagne d’une valorisation morale de ce futur humain qui en fait un humanisme non seulement théorique mais pratique [15]. La seconde ignorance tient à ce qu’il ne connaît absolument pas – ou alors il n’en tient pas compte – la forme moderne du matérialisme telle qu’on peut la tirer de la théorie de l’évolution de Darwin quand elle débouche sur l’homme [16]. Or c’est un matérialisme – j’en rappelle délibérément la la signification ou la portée – qui repose fondamentalement sur l’idée d’une matière en évolution ou transformation permanente, justement (contrairement au matérialisme antique), qui s’est modifiée jusqu’à avoir produit l’homme non comme un simple « objet » (comme l’avance Sartre) et encore moins comme un simple animal, mais comme un être spécifique, en évolution lui aussi, et, surtout, qui a rompu avec ce qui l’a précédé dans la chaîne naturelle tout en en dérivant, rupture qui a fait émerger en lui des capacités intellectuelles et morales inédites, lesquelles lui assurent une dignité essentielle ou éminente et en ont fait un véritable sujet, capable de connaître, de se connaître aussi [17], et de juger sur un plan normatif à la lumières de valeurs morales de type kantien, qui sont les valeurs morales tout court [18]. C’est en quoi l’accusation de Sartre envers le matérialisme est rigoureusement un non-sens et répercute un préjugé antimatérialiste répandu et d’une grande banalité ! Enfin, il y a l’incompréhension philosophique que j’ai signalée allusivement et qui concerne en réalité sa conception métaphysique de la liberté connectée à sa conception, elle aussi métaphysique, du sujet. Or Sartre, ici aussi, a tout faux [19]. Car, contrairement ce qu’il dit ou à ce qu’il refuse d’envisager, c’est justement sur le terrain du déterminisme matérialiste qu’une liberté réelle peut se concevoir ou se laisser comprendre. Il faut se souvenir ici et à nouveau de ce qu’Engels en a dit dans l’Anti-Dühring [20], sous une forme simple mais essentielle et que je reprends à mon compte, quitte à l’enrichir dans le détail à la lumière de notre modernité scientifique : « La liberté n’est pas dans une indépendance rêvée à l’égard des lois de la nature, mais dans la connaissance de ces lois et dans la possibilité donnée par là même de les mettre en œuvre méthodiquement pour des fins déterminées. » Il précise qu’il s’agit aussi bien « des lois de la nature extérieure que de celles qui régissent l’existence physique et psychique de l’homme » et que la liberté de la volonté « ne signifie donc pas autre chose que la faculté de décider en connaissance de cause ». Et s’il est vrai que parfois nous paraissons hésiter entre des possibles – comme les descriptions de la conscience par Sartre semblent nous le faire croire – c’est sous l’effet d’une ignorance des « nécessités naturelles » qui nous rend en réalité non-libres. Nous sommes ici en présence non d’une liberté métaphysique originelle autant qu’absolue et « déjà-là », mais d’une liberté-libération qui présente des degrés (et donc aussi des limites en même temps qu’un avenir de progrès) et qui « est nécessairement un produit du développement historique ». On voit ici à quel point l’idéalisme subjectiviste de la conscience inhérent à la phénoménologie peut entraîner à une incompréhension philosophique profonde de ce qu’est, concrètement et effectivement, la liberté humaine, incompréhension qui enferme l’homme dans les conditions historiques auxquelles il reste alors soumis et qui le privent de liberté. A tel point, mais je ne développerai pas longuement ce qui suit, que Sartre, à partir des années 1950, va se tourner vers le marxisme et l’option communiste en écrivant une Critique de la raison dialectique [21] et changer du coup sa philosophie de l’homme, acceptant d’y intégrer le déterminisme qu’il aura longtemps refusé. Cela ira jusqu’à influencer considérablement son étude sur Flaubert, L’idiot de la famille [22] où il tente d’expliquer (et non seulement de décrire) le parcours existentiel et littéraire de Flaubert sur la double base d’un déterminisme du milieu familial et du milieu social, en recourant donc, fût-ce à sa manière, à la psychanalyse et au marxisme [23]. Et cela l’amènera à tourner le dos à son anthropologie philosophique antérieure, au point de déclarer dans une interview au Monde : « L’homme ne se fait pas, il est fait », sous-entendu : par les conditions dans lesquelles il vit. Cependant, il ne rompt pas totalement avec sa philosophie précédente en ajoutant cette précision qui me paraît pertinente : « On peut faire quelque chose de ce qu’on a fait de nous », ce qui préserve l’inventivité de la vie individuelle… sauf que celle-ci peut être elle aussi déterminée dans son inventivité même, à partir de processus que le sujet ignore ! [24]
Critique de l’idéalisme philosophique. Approche théorique et politique , d’Yvon Quiniou. L’Harmattan
A lire également sur le site :
https://lafauteadiderot.net/Sartre-le-marxisme-et-la
https://lafauteadiderot.net/Le-marxisme-est-il-un-humanisme
[1] Op. cité, Gallimard, 1947.
[2] Op. cité, Gallimard, 1948. Mais le texte, comme le précèdent, date de 1946, donc bien avant qu’il ne se tourne vers le marxisme.
[3] Op. cité, Gallimard, p.125.
[4] Op. cité, p. 139 et p. 141.
[5] On sait désormais, par exemple, que l’épigenèse d’un individu peut être influencée par des interventions éducatives qu’elle enregistre.
[6] Voir plus haut.
[7] Hermann.
[8] Nagel.
[9] Op. cité, p. 69. Il a même été capable d’affirmer, dans une article des Lettres françaises en 1944 : « Jamais nous n’avons été aussi libres que sous l’occupation allemande » ! Bien entendu, c’est de la liberté ontologique qu’il parle.
[10] In L’idéologie allemande.
[11] Je rappelle que l’athéisme, contrairement à l’agnosticisme, est une position métaphysique, ce que Sartre admet.
[12] Op. cité, p. 22 et p. 24. On opposera donc à ce diagnostic de responsabilité absolue de l’homme vis-à-vis de lui-même, la manière, magnifique, qu’a eu Marx dans la préface du Capital, de préciser que sa critique du capitaliste et du propriétaire foncier visait leurs fonctions économiques et non les individus qui en sont les supports. Pour lui, l’individu n’est pas « responsable de rapports dont il reste socialement la créature, quoi qu’il puisse faire pour s’en dégager ». C’est là un véritable humanisme, à savoir concret !
[13] Ib., p. 65.
[14] Op. cité, Editions sociales, p. 87.
[15] Ib., p. 143. Par contre il est vrai qu’un certaine « scolastique marxiste » (comme il dit) a pu s’embourber dans un refus de l’humanisme moral.
[16] Voir une nouvelle fois La filiation de l’homme, éclairée par la lecture qu’en a faite P. Tort.
[17] Capacité dont le matérialisme ne saurait rendre compte selon Sartre, ce qui l’entraînerait à se contredire et à se rendre impossible comme philosophie ! Voir Situations III, p. 140.
[18] Darwin, dans l’ouvrage cité, se réfère à Kant et indique qu’il a retrouvé la morale telle que celui-ci l’a portée au concept, sur la base de sa propre théorie !
[19] Cela n’enlève rien, pat ailleurs, au brio et à la justesse, à leur niveau, de ses analyses phénoménologiques. Mais il aura commis l’erreur fondamentale et idéaliste de prendre l’apparence d’un phénomène tel qu’il se donne à la conscience pour son essence réelle.
[20] Op. cité, Editions sociales, 1ère partie, ch. XI, p. 142.
[21] NRF/Gallimard, 1960.
[22] NRF/Gallimard, 1971.
[23] Je dis bien « à sa manière » car, par exemple, il recourt à l’idée d’une « psychanalyse existentielle », qui n’est pas exactement la psychanalyse freudienne et que quelqu’un comme Bourdieu, par ailleurs, critiquera au nom de la spécificité du champ littéraire dans lequel Flaubert a écrit.
[24] Voir les héritages culturels dans les familles d’artistes, d’intellectuels ou de professions libérales, qui ne sont pas de l’ordre de la seule hérédité biologique, ou encore les stimulations psychologiques venant des parents qui peuvent inciter un enfant à développer ses talents et donc, éventuellement, sa créativité. J’ajoute, en sens inverse, que des conditions affectives d’éducation déplorables peuvent aussi avoir, paradoxalement, des effets positifs sur la base d’une réaction vitale du sujet. On en a des exemples comme la réussite de Balzac malgré des rapports très difficiles avec sa mère !