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Le nucléaire civil après la catastrophe du Japon
Marie-Claire Cailletaud, de la CGT-Energie, répond aux questions des internautes du Monde.fr

Tutu : Existe-t-il en France des salariés prêts à être envoyés "au charbon" en cas d’accident, comme à Fukushima ? Sont-ils volontaires ? Que risquent-ils ?

Marie-Claire Cailletaud : L’objectif, bien entendu, est de ne pas arriver dans des situations telles que celle que sont en train de vivre les Japonais. Il est bien évident que l’acceptabilité du nucléaire en France est due à sa maîtrise publique et qu’il faut absolument contrôler au maximum les risques induits par cette industrie. Par ailleurs, le retour d’expérience sera fait à partir de ce qui se passe au Japon pour améliorer le niveau de sûreté des centrales en France, sachant que nous considérons que les conditions de travail, l’organisation du travail des salariés font partie des conditions de sûreté.

Riri : On dit que certaines centrales françaises sont très vieilles et pourraient présenter des risques graves en cas de catastophes naturelles, qu’en pensez-vous ?

Marie-Claire Cailletaud : Ce que je dis par rapport à ces sujets, c’est qu’il faut se garder de tirer des conclusions hâtives de la situation au Japon. Il va être nécessaire de prendre le temps d’examiner précisément ce qui s’est passé, ainsi que l’enchaînement des événements. Concernant les centrales nucléaires en France, je rappelle que c’est l’Autorité de sûreté nucléaire (l’ASN) qui inspecte les centrales et qui leur donne ou non l’autorisation de fonctionner. C’est elle qui donne aussi la prolongation dans le cadre de l’allongement des durées de vie. L’existence d’une autorité de sûreté en France, indépendante, est une condition importante de l’existence d’une telle filière.

Jean-Claude : Combien gagne le personnel qui travaille dans les centrales nucléaires en France ? Quelle est leur espérance de vie ? Sont-ils plus exposés que d’autres ?

Marie-Claire Cailletaud : Les salaires varient principalement en fonction du poste occupé, de la responsabilité et, bien entendu, de l’astreinte – fonctionnement ou non en 3×8 –, etc. Il existe dans l’industrie nucléaire un facteur important que nous combattons farouchement : la sous-traitance. Les sous-traitants sont malheureusement les salariés les moins bien payés et les plus exposés. C’est un véritable problème, aussi bien vis-à-vis de ces salariés que vis-à-vis du fonctionnement et de la sûreté de la centrale plus généralement.

Roger31 : A qui appartiennent les centrales nucléaires en France ? Qui est chargé de leur entretien ?

Marie-Claire Cailletaud : Les centrales nucléaires en France appartiennent à EDF. EDF en est l’exploitant, et il est responsable devant la loi de la sûreté. C’est lui qui doit assurer la maintenance et les conditions de travail du personnel dans ses centrales. A ce propos, nous devons faire le lien avec la loi NOME (nouvelle organisation du marché électrique) qui vient d’être votée au Parlement sous injonction gouvernementale.

Dans l’unique but de favoriser la concurrence sur l’électricité produite par les centrales nucléaires, cette loi va obliger l’opérateur public, EDF, à céder 25 % de sa production à ses concurrents. On imagine aisément que c’est autant d’imputation de ses moyens financiers, dont il a pourtant besoin pour entretenir et renouveler son parc. Ceux qui aujourd’hui s’inquiètent des conditions d’exploitation du nucléaire devraient s’associer à la CGT pour combattre cette loi et demander un réexamen compte tenu de la situation internationale.

Val : La sous-traitance vers des entreprises privées des sites nucléaire représente-t-elle un risque dans l’entretien des centrales ?

Marie-Claire Cailletaud : Le risque n’est pas lié directement au fait que le salarié est sous-traitant ou non, il est directement lié au statut du personnel, et donc aux conditions de travail de ces salariés qui sont souvent parfaitement scandaleuses. Il est également lié, bien entendu, au fait que les entreprises sous-traitantes doivent tirer sur les prix pour emporter les marchés. De ce fait-là, on peut dire que la sûreté n’a de poids que comparée aux profits que doit dégager l’entreprise. Mais cela s’applique également à EDF. On peut dire qu’il y a antagonisme d’intérêts entre rémunérer le capital privé et développer une politique industrielle au service de tous.

Joël57 : Aujourd’hui nous entendons deux sons de cloche, l’un nous dit que la France est à la pointe en matière de sûreté nucléaire, l’autre que nous nous voilons la face par excès de chauvinisme. Qu’en est-il réellement ?

Marie-Claire Cailletaud : Je crois qu’il faut se garder, dans ce type de situation, de raisonner en tout ou rien. Il est bien évident que la situation française n’est pas comparable à celle du Japon. Néanmoins, personne, évidemment, n’est capable de garantir aujourd’hui qu’on est complètement à l’abri d’un accident. Le rôle d’une organisation syndicale comme la CGT est d’exprimer ce que vivent et ce qu’analysent les salariés qui travaillent dans le secteur. L’avis de ces salariés peut bien entendu être amené à être différent de celui d’une entreprise si celle-ci ne poursuit pas les mêmes objectifs.

Nous avons déjà depuis longtemps des revendications en termes de conditions de travail, d’organisation du travail, de remplacement du personnel et de la sous-traitance qui est une question extrêmement importante du point de vue humain et industriel. Nous réclamons un statut unique pour tous les salariés du secteur. Espérons que dans la période nous aurons plus de poids pour nous faire entendre.

Joël : Quelle est l’alternative crédible à l’énergie nucléaire aujourd’hui ? Existe-t-il des solutions permettant de se passer de cette énergie à court terme ?

Marie-Claire Cailletaud : Nous réclamons depuis longtemps déjà un débat autour des questions énergétiques. La question de l’énergie est une question centrale pour aujourd’hui et pour demain, pour plusieurs raisons. Tout d’abord, l’énergie est nécessaire au développement humain. Nous le voyons aujourd’hui : 2 milliards de personnes sur la planète en sont encore privées. Nous sommes également confrontés au problème de la raréfaction des ressources fossiles qui ont permis le développement des pays comme le nôtre.De plus, nous devons affronter la question essentielle du réchauffement climatique et de l’émission de gaz à effet de serre. Donc poser les questions énergétiques, c’est répondre à ces trois questions.

Nous estimons que la réponse doit prendre en compte toutes les énergies disponibles. C’est ce que nous appelons le "mix" énergétique. Ce "mix" énergétique doit être différent en fonction de la géographie des pays et de leur maîtrise technologique. Donc toutes les ressources vont devoir être utilisées. Les énergies renouvelables en font naturellement partie. Il faut accélérer la recherche, en particulier sur le photovoltaïque, qui a des marges de progression importantes, et développer une vraie filière. C’est une tout autre politique qui est menée en France aujourd’hui.

Rappelons que tant que nous ne saurons pas stocker l’électricité, les énergies renouvelables sont contraintes à être complétées par un autre mode de production d’électricité, souvent à base de thermique. Dans ce "mix", nous considérons que l’énergie nucléaire a toute sa place, mais pas dans n’importe quelles conditions. Il faut impérativement que ces décisions soient prises démocratiquement et de manière transparente et que le secteur énergétique reste sous maîtrise publique.

Jacques : L’ASN est-elle réellement independante ? Comment est-elle financée ?

Marie-Claire Cailletaud : L’ASN est une autorité complètement indépendante. Pour s’en convaincre, il suffit de lire le rapport Roussely, qui estime que ses exigences sont trop grandes par rapport à celles du marché. Les financements viennent de l’Etat. L’ASN s’appuie sur les travaux de l’IRSN. On peut voir le rôle que joue cette autorité pour donner toutes les informations sur la situation au Japon.

Josh : Tous ça ne nous dit pas clairement si vous pensez (ou non) que la France doit s’efforcer de sortir du nucléaire (ou non). Quelle est votre position exacte ?

Marie-Claire Cailletaud : La position de la CGT, très clairement, n’est pas pour une sortie du nucléaire. Il n’y a aucune ambiguïté là-dessus. En revanche, nous l’avons dit, pas à n’importe quelles conditions, sous maîtrise publique qui doit permettre une véritable appropriation sociale du secteur. Nous avons des propositions pour le permettre, avec des droits accrus d’intervention pour les salariés, mais aussi pour les citoyens.

Klutz : Au-delà de l’accident dramatique qui occupe malheureusement l’actualité, le problème des déchets reste l’autre problème majeur de l’industrie électro-nucléaire. Depuis près de soixante ans que la filière existe il n’a toujours pas été trouvé de solution pour gérer correctement ces déchets radioactifs. Comment se positionne votre syndicat sur cette question ?

Marie-Claire Cailletaud : Sur cette question, comme globalement, sur toutes les questions énergétiques. Il y a une question centrale qui est celle de la place de la recherche. Si l’on savait stocker l’électricité, le paysage énergétique en serait bousculé. Il faut donc accélérer la recherche sur le sujet.

Concernant le nucléaire, il faut bien sûr continuer et amplifier la recherche sur deux axes : la génération 4, qui est la génération qui permettra d’économiser l’uranium de telle sorte que son approvisionnement ne sera plus un problème ; et les déchets. La loi de 2006 permet d’envisager les trois pistes de recherche pour les déchets. Je me permettrai de dire au passage qu’il y a peu d’industries qui se soucient dès le départ de la sûreté et de la gestion des déchets qu’elles produisent. Il n’est bien entendu pas question de minimiser ce sujet, mais dans ce débat, il nous faut répondre à une question essentielle : est-ce que l’urgence, ce sont les émissions de CO2, et donc la sortie des ressources fossiles, ou non ?

Yvon : La première des mesures à prendre n’est-elle pas la renationalisation immédiate d’EDF ? La sécurité des Francais doit-elle être confiée aux mains du privé ?

Marie-Claire Cailletaud : C’est une très bonne question. La CGT parle de "pôle public de l’énergie". Ce concept que nous avons élaboré part de deux constats : d’abord, la propriété des entreprises n’est pas suffisante pour intervenir directement sur ses choix de gestion ; ensuite, nous sommes face à un secteur qui a été profondément déstructuré par les différentes lois depuis 2000, et nous avons des entreprises à statuts différents, comme la privatisation de GDF-Suez. Pour cela nous développons un concept de pôle public qui non seulement s’attaque à la propriété des entreprises, mais ajoute la maîtrise publique en donnant des droits nouveaux aux salariés et aux citoyens, afin de permettre une véritable appropriation sociale du secteur.

Calie : On parle souvent de l’impossibilité de sortir du nucléaire en raison des besoins accrus en électricité. Parallèlement on constate l’essor sans fin de gadgets électriques, des éclairages publiques grandioses et des constructions toujours aussi énergétiquement peu efficientes. Ne faudrait-il pas déplacer le débat de la production à la consommation d’énergie ?

Marie-Claire Cailletaud : Je suis entièrement d’accord sur le fait de revoir notre mode de consommation ainsi que nos modes de production. Bref, la façon dont nous nous développons. Nous devons faire des économies d’énergie. Cela nécessite par exemple d’avoir une politique d’isolation de l’habitat, de revoir tout l’urbanisme afin d’éviter des modes de déplacement très consommateurs d’énergie. Après, il faut poser la question de la société dans laquelle on veut vivre.

Est-ce qu’on souhaite avoir un pays qui conserve une industrie ou non ? Car quand on parle d’énergie et d’électricité, il faut parler avec des ordres de grandeur. Il est impossible aujourd’hui de se passer du nucléaire uniquement avec du renouvelable et des économies d’énergie. Cela impliquerait de réduire de 50 % notre consommation. La question qui se pose est de savoir où nous faisons ces réductions.

Une autre question qui se pose, et qui n’est pas anodine, est la question du prix. Quand on voit qu’en France 3,4 millions de foyers, soit 8 millions de personnes, sont en précarité énergétique, et que 100 000 personnes subissent tous les ans des coupures d’électricité et autant en gaz, on voit que la question du tarif et du droit à l’énergie n’est pas résolue en France.

Laurent G : Ne pensez-vous pas que le moment serait venu d’autoriser les habitants à créer leur propre énergie afin de sortir peu à peu d’un système nucléaire, qui produira un jour ou l’autre un grave accident en France ?

Marie-Claire Cailletaud : Je le redis : toutes les formes d’énergie sont à regarder, aussi bien en France que dans le monde. A des degrés divers, les modes de production d’énergie ont tous des avantages et des inconvénients, et c’est cela qu’il faut peser objectivement pour faire des choix. Développer l’éolien comme l’énergie solaire est nécessaire, mais on ne peut pas dire aujourd’hui qu’ils peuvent être à eux seuls notre moyen de nous fournir en électricité. Il faut développer également l’hydraulique, principalement au travers des stations de pompage (des "STEP") qui sont un moyen de stocker l’électricité.

Il faudra également regarder la question du charbon propre avec captage et stockage de CO2, mais qui pose également des problèmes d’acceptabilité pour injecter le CO2 dans le sous-sol. On peut imaginer également d’augmenter la desserte gaz pour une utilisation directe et, dans un ordre de grandeur moindre, utiliser des cycles combinés gaz qui peuvent démarrer facilement et effectuer un complément aux heures de pointe. Dans ce paysage énergétique, il ne paraît pas possible aujourd’hui d’exclure l’énergie nucléaire. La question est donc de la développer dans les meilleures conditions possibles.

Yoann O : D’où proviennent les combustibles, uranium et plutonium, utilisés dans les centrales nucléaires ?

Marie-Claire Cailletaud : L’uranium en particulier provient de mines à travers le monde. Par exemple du Niger. Les politiques menées par les multinationales, que ce soit pour l’extraction de l’uranium ou pour les autres ressources, sont bien souvent inacceptables. La possession des ressources énergétiques de la planète a souvent conduit, par le passé, à des guerres. Ce n’est pas fini. Nous voyons aujourd’hui les enjeux pour posséder le pétrole ou avoir le contrôle d’un pays par lequel passerait un gazoduc. Cette manière coloniale puis guerrière de s’approprier les ressources pour son propre développement n’est pas acceptable. C’est pour cela que nous proposons que les ressources fossiles soient considérées comme des biens publics mondiaux à gérer collectivement.

Cyril : Au niveau des nouvelles sources possibles d’énergie : quid du gaz de schiste ? Cela vous paraît-il être une perspective à étudier malgré l’opposition de certains écologistes (Fabrice Nicolino en tête) ?

Marie-Claire Cailletaud : L’arrivée du gaz de schiste bouleverse le marché du gaz. Pour exemple, les Etats-Unis, qui étaient importateurs de gaz, deviennent exportateurs. Ils exploitent le gaz de schiste d’une façon inacceptable qui cause des dégâts environnementaux très importants, comme la pollution des nappes phréatiques.

Chez eux, le problème se pose différemment, puisque le sous-sol appartient à la personne qui a le terrain. C’est ce qui a poussé à un développement rapide et peu regardant des conditions d’exploitation. Il ne serait donc pas question d’exploiter le gaz de cette façon-là en France. En revanche, il nous semble intéressant de savoir si nous possédons ou non du gaz de schiste. Cela ne peut se faire que par l’exploration. Cette exploration pourrait montrer que la question ne se pose même pas en France. Dans tous les cas, s’il devait y avoir une décision, elle ne pourrait être prise qu’avec les citoyens. C’est pour cela qu’il faudrait organiser des états généraux sur le sujet afin d’en débattre.

Mais nous voyons bien que le problème se pose différemment d’un pays à l’autre. Par exemple, la Chine a besoin d’apporter l’énergie à 1,4 milliard d’êtres humains, bientôt 2 milliards si, comme cela va être le cas, elle autorise les familles en ville à avoir un deuxième enfant. La Chine possède beaucoup de gaz de schiste. Alors, entre le nucléaire, le charbon, le gaz de schiste ?

Pierre S. : Pensez-vous que le CEA doit rester l’actionnaire majoritaire d’Areva plutôt qu’une participation directe de l’Etat ?

Marie-Claire Cailletaud : Le CEA est la propriété de l’Etat. Ce que nous réclamons, c’est une mise en cohérence de la filière industrielle nucléaire CEA-Areva-EDF, ce qui n’est pas du tout le cas aujourd’hui. Et ça, l’Etat peut le faire, puisqu’il a la main sur ces trois entreprises. Mais aujourd’hui, force est de constater qu’il ne joue pas son rôle et qu’il manque singulièrement de vision industrielle.

Aymeric B : N’est-il pas plus intéressant de développer la recherche sur la fusion nucléaire que de continuer sur celle de la fission ?

Marie-Claire Cailletaud : La recherche sur la fusion est développée avec le projet ITER. Il me semble aujourd’hui qu’il ne faut négliger aucune voie de recherche compte tenu de la complexité des réponses à apporter dans le domaine énergétique.

Pierre S. : L’Italie, le Danemark, l’Autriche n’ont pas de centrales nucléaires, l’Allemagne envisage de s’en passer. d’où vient votre acharnement à défendre cette filière ?

Marie-Claire Cailletaud : L’Allemagne envisage de se passer du nucléaire de façon particulièrement opportuniste en période électorale. D’ores et déjà, les industriels allemands annoncent qu’ils vont subir des coupures. D’autre part, l’Allemagne est un des pays les plus émetteurs de CO2. Cela signifie donc qu’on considère que la question posée par le réchauffement climatique, le problème des eaux, les migrations des populations et ce qui en découle est secondaire. Il y a fort à parier que l’Allemagne pourra profiter à tarif avantageux et grâce à la loi NOME de l’énergie nucléaire produite en France pour financer son industrie.

Pierre S. : Quelle est votre position vis-à-vis des populations qui refusent d’accueillir les sites d’enfouissement des déchets ultimes ? Sur le MOX, qui contient du plutonium extrêmement dangereux ?

Marie-Claire Cailletaud : Je pense qu’il faut que les débats puissent se dérouler afin que les citoyens puissent s’approprier tous les enjeux des questions énergétiques.Il n’est bien entendu pas question d’imposer quoi que ce soit en ce domaine. Il est essentiel que ce soit le citoyen qui choisisse, et de manière démocratique. En revanche, il faut avoir conscience des conséquences de ces choix. Par exemple, est-ce que la Bretagne peut continuer à refuser l’implantation de moyens de production, c’est-à-dire qu’elle ne produit que 8 % de ce qu’elle consomme. Est-ce qu’elle peut continuer, de ce fait-là, à se désindustrialiser, puisque les entreprises ne peuvent pas s’implanter en Bretagne à cause de la fourniture en électricité.

Hervé : Seriez-vous prête à vivre à coté de tels sites ?

Marie-Claire Cailletaud : Mon souhait premier, c’est de vivre à côté de mon lieu de travail, de pouvoir y aller à pied, et de ne pas me "taper" une heure de bouchon dans les transports aller et retour tous les jours.

Alain Dumont : La quatrième génération n’est-elle pas un leurre, ce sont des réacteurs à neutrons rapides, technologie qui existe déjà et qui n’a pas fait ces preuves, ce sont les réacteurs Phénix et Superphénix qui ont été des gouffres financiers et qui n’ont jamais fourni d’électricité, sauf peut-être pour leur fonctionnement propre ?

Marie-Claire Cailletaud : Superphénix avait permis d’avoir une véritable avancée en termes de recherche sur le rapide. Je rappelle que c’était un réacteur de recherche et que les scientifiques qui ont travaillé dessus à l’époque sont unanimes pour dire que la décision politicienne de fermer ce réacteur nous a fait prendre quinze ans de retard dans ce domaine. C’est un formidable gâchis.

Joel : La sécurité de la filière nucléaire française est-elle supérieure à celle du Japon ?

Marie-Claire Cailletaud : Il faut être très prudent pour répondre à cette question, et il est nécessaire d’attendre le retour d’expérience sur ce qui s’est passé. En effet, aujourd’hui, beaucoup de questions se posent, même si l’événement subi était d’une ampleur exceptionnelle. Par ailleurs, l’opérateur privé Tepco est connu pour avoir falsifié par le passé des rapports pour cacher des incidents.

Aujourd’hui, au Japon, se déroule une polémique concernant le fait que Tepco aurait attendu avant de prendre la décision de noyer ses réacteurs, ce qui les rend inutilisables. Ce qui importe aujourd’hui, c’est de tirer les leçons de ce qui se passe, afin d’inspecter les cinquante-huit tranches nucléaires, mais également de mettre sur le tapis les conditions de travail et l’organisation du travail.

Sur le site du Monde. 22 mars 2011. Chat modéré par Samuel Laurent


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