Ce recueil se présente comme d’habitude : deux suites de poèmes encadrent une série de réflexions sur la poésie et le poème…
Des barres grisées constituent l’unité de cet ouvrage : elles ouvrent, en effet, ces pages avant de laisser la place à des interventions plus colorées faites de deux bandeaux. Mais elles font aussi l’unité de la deuxième partie, Devant nous le poème, avant d’abandonner la page à des tondi, plutôt réalistes, puisque on devine des formes reconnaissables (arbres et falaises) où domine le bleu-vert. Comme si le regard donnait naissance aux poèmes. La quatrième de couverture le dit d’ailleurs admirablement : « En étant attentives à ce qui au-dehors les appelait, la peinture et la poésie n’ont pas renoncé à leur vocation particulière, être elles-mêmes, pleinement, elles sont devenues inséparables, elles s’éclairent comme elles respirent, ensemble. » Mais, présentant le travail du peintre, la quatrième de couverture ajoute à ces mots éclairants : « Ses paysages révèlent une perception intime de l’espace et de la lumière qui trouve écho auprès des poètes ».
Attente et vacuité semblent être les caractéristiques du poète : il fera le vide en soi pour pouvoir écrire : au-delà de l’esprit strictement individuel les poèmes illustrent autre chose que le moi du poète. Poèmes et réflexions sont intimement liées : c’est une leçon d’écriture poétique que donne à son lecteur Pierre Dhainaut (qui ne sera pas satisfait de mes propos !). C’est à une nouvelle définition du hasard objectif que se livre le poète : « Il faudra prendre du recul, non pas pour diriger le mouvement, mais pour que se révèle son dessein secret. » Plus pratique, Pierre Dhainaut s’interroge : « … comment intervenir afin de dégager le poème de ce qui l’étouffe, à quel instant cesser d’intervenir ? ». Autrement dit : « Un poème ne décrit pas, mais à la façon dont ses mots vibrent, il témoignera de ce que l’auteur a vu avant de l’écrire… » Leçon d’humilité et de patience ! Deuxième leçon : car il y en a tant dans ces notes ! On retrouve aussi la notion de souffle : « Ne reprochons pas aux mots de nous abuser, aimons-les en en leur accordant notre souffle, aimons les poèmes qui accroissent ». La poésie « respire en nous comme au large »…
Restera à relire ce recueil afin de mettre en regard les poèmes et la réflexion sur la poésie, les pièces de vers… Une belle réussite !
Pierre Dhainaut : Paysage de genèse. Voix d’encre, non paginé, 20 euros. Illustrations de Caroline François-Rubino.