« Aujourd’hui, nous devons admettre que les risques d’impacts négatifs liés au changement climatique sont plus élevés que ce qui avait été estimé il y a quelques années », affirme Hans-Martin Füssel, du Potsdam Institute of Climate Impact Research (PIK). Il est l’un des auteurs d’une publication (dans les Pnas) qui effectue une nouvelle analyse des données du Giec (Groupe intergouvernemental d’experts sur le climat). Un résumé est disponible dans un communiqué de l’université de Postdam.
Selon lui et les autres co-auteurs de cette publication, les risques s’accroîtraient de façon très significative, y compris au départ de petites augmentations de température des moyennes terrestres au-dessus du niveau de 1990. Cette hypothèse se base, entre autres, sur la constatation que de nombreux écosystèmes comme les récifs coralliens ou les glaciers se sont avérés beaucoup plus sensibles au réchauffement et à l’augmentation de la concentration de CO2 que ce qui avait été anticipé par le troisième rapport du GIEC en 2001.
La nouvelle estimation est basée sur une observation des impacts du réchauffement et une « meilleure compréhension » du système climatique. En outre, les régions, les secteurs et les populations affectées par ces changements ont été recensés avec plus de précision.
En conclusion, il est de plus en plus évident que même les plus légères augmentations de la température moyenne au-dessus des valeurs de 1990 peuvent dérégler le système climatique dans son ensemble avec le risque d’incidences très importantes s’étalant sur plusieurs siècles, comme la fonte accélérée des glaces du Groenland avec de multiples conséquences irréversibles sur l’environnement (réchauffement en cascade par réduction de l’effet d’albédo, injection d’eau douce dans la mer entraînant la suppression, voire l’inversion de courants marins, hausse du niveau océanique, etc.).
Du travail pour la prochaine réunion de Copenhague
La recrudescence des ouragans, des incendies, les vagues successives de sécheresses et les canicules en nette augmentation depuis le début de la décennie entraînent déjà des dégâts et des pertes humaines bien plus importantes qu’au cours de périodes identiques lors du dernier siècle. « Si le risque est plus important, la nécessité de réduire les émissions de gaz à effet de serre est aussi plus grande, tout comme le besoin d’aider les régions les plus vulnérables dans le monde à faire face aux conséquences du changement climatique. Une telle approche est aussi une question de justice puisque nombre de pays émettant le moins de gaz à effet de serre sont aussi les plus faibles et les plus affectés », commente Hans-Martin Füssel.
Selon le rapport, il y a nécessité absolue de limiter le réchauffement climatique à deux degrés par rapport aux moyennes de 1990 sous peine de modifications climatiques graves et irréversibles. Stephen Schneider, climatologue à l’université de Stanford en Californie, co-auteur à la fois des rapports de 2001 et 2009, affirme qu’il serait dramatique que la conférence sur le changement climatique organisée par les Nations-Unies à Copenhague à la fin de cette année ne tienne pas compte de ces nouveaux paramètres.
Il y a seulement une semaine, Christopher Field, directeur du Department of Global Ecology de la Carnegie Institution de Washington, avait déclaré lors de la réunion annuelle de l’Association américaine pour le progrès de la science que l’augmentation des rejets de CO2 dans l’atmosphère était passée de 0,9 % par an dans les années 90 à 3,5 % par an depuis l’an 2000.
L’étude actuelle avait été précédée de deux autres, soulignant déjà la sous-estimation du risque climatique.
Fin janvier 2009, une étude de Susan Solomon, de la NOAA (National Oceanic and Atmospheric Administration), concluait que l’augmentation de la température de surface des océans, des précipitations et du niveau océanique ont déjà introduit des changements irréversibles qui ne pourront s’atténuer que mille ans après l’arrêt complet des émissions de CO2.
Le 14 février dernier, un rapport de la Carnegie Institution rédigé par Chris Field avertissait que l’accumulation beaucoup plus rapide que prévu des gaz à effet de serre dans l’atmosphère augmente le risque d’un changement climatique irréversible d’ici la fin du siècle.
Enfin, l’étude pour l’Année polaire internationale (API), menée sur le terrain en 2007 et 2008 par des milliers de scientifiques, et qui vient de se clôturer, a révélé que le réchauffement en Antarctique est « beaucoup plus étendu que prévu », tandis que les glaces arctiques se réduisent et que la fonte du dôme de glace du Groënland s’accélère.
Article publié sur le site http://www.futura-sciences.com