Sophie oscille entre son amour « sécuritaire » pour Trent, son compagnon, et l’amour passion qui croît au fil du récit pour « Docteur Mathisse », son psychiatre. Une inclination qu’elle met d’abord sur le compte du fameux « transfert psychanalytique ». Pourtant d’échanges artistiques en allusions érotiques, l’attirance de Mathisse pour Sophie devient évidente… Cette dernière sent le danger d’une relation avec un homme qui transgresse sans remords apparents les codes de la relation médecin-patient, mais se laisse peu à peu séduire.
Histoire d’amour, histoires d’amour plutôt… oui, mais pas seulement. Entre Trent et Mathisse, Sophie cherche qui elle est, quelle vie elle veut, quelles exigences elle se pose en tant qu’individu, femme et artiste. Les lecteurs, a fortiori les femmes de notre époque, se reconnaîtront aisément dans ces aspirations contradictoires, dont la résolution ne va pas sans souffrances. Le grand saut pour Sophie, ce sera d’oser la solitude et d’affronter son seul vrai désir : celui d’écrire.
Ce qui fait la force de ce premier roman, c’est l’humour irrésistible de son auteur. Même dans les moments les plus dramatiques de ce récit, Sophie Taam se moque de ses allures de tragi-comédienne (car amour, art et vie sont toujours posés comme des dilemmes cornéliens), fait la pirouette et invite le lecteur à sourire de ses malheurs avec elle. Les vrais traumatismes dont elle énumère les somatisations réelles ou inventées (ce qu’elle appelle le « syndrôme Vidal ») sont à peine effleurés. Ce qui compte, c’est l’ici-maintenant. D’où le sentiment d’urgence qui ressort de ce roman, cette écriture précise et rythmée, ce scénario qui s’attache à l’essentiel et n’ose la digression que pour la prise de recul nécessaire au rire… Efforçons-nous d’être à la hauteur de nos rêves mais gardons-nous de nous prendre trop au sérieux, semble nous souffler Sophie Taam dans son Sexuel transfert. À quand un roman de confirmation ?
Sophie Taam, Sexuel transfert, éditions Incognito, 2009.