Le 15 novembre 2005, la mission de l’Assemblée Nationale sur l’effet de serre procédait à l’audition de Jean Jouzel. Jean Jouzel est, avec Claude Lorius, celui à qui l’on doit l’histoire du climat dans les 500.000 dernières années, grâce à l’analyse des carottes de glace prélevées en Antarctique. Sans lui, les intuitions sur l’impact des variations de la teneur en gaz carbonique de l’atmosphère sur sa tempé-rature en seraient restées au stade des hypothèses. Et si nous avons aujourd’hui une chance de limiter le réchauffement climatique, c’est pour une bonne part grâce à lui.
Nous publions son intervention liminaire. Le texte intégral de l’audition est disponible sur le site de l’Assemblée Nationale.
Audition de M. Jean JOUZEL
Directeur de l’Institut Pierre Simon Laplace
(extrait du procès-verbal de la séance du 15 novembre 2005)
Présidence de M. Jean-Yves LE DEAUT
M. Jean JOUZEL : Je vous remercie de votre invitation, au nom de toute la communauté scientifique, qui est très demandeuse d’un dialogue avec les décideurs politiques et je suis naturellement très honoré d’être votre premier invité. Mon exposé consistera en un tour d’horizon général des questions soulevées par l’accroissement de l’effet de serre, certains développements étant plus détaillés afin de répondre aux questions que vous m’avez posées par écrit.
Nous avons la chance d’avoir commencé l’étude du phénomène de l’effet de serre dès les années 1970, si bien qu’à la fin des années 1980 existaient déjà des programmes scientifiques sur ce que les Anglo-Saxons appellent « global change » et qu’a pu être constitué, en 1988, à l’initiative de l’OMM et du PNUE, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, appelé couramment le GIEC, qui est vite devenu un lieu de dia-logue entre scientifiques et politiques du monde entier et auquel je participe activement.
Le GIEC a publié trois rapports successifs, en 1990, 1995 et 2001. Chacun d’eux se compose de trois docu-ments, élaborés par les trois groupes de travail constitués au sein du GIEC : le premier sur les éléments scienti-fiques, le deuxième sur les conséquences, l’adaptation et la vulnérabilité, le troisième sur les mesures d’atté-nuation possibles. Chacun de ces trois documents comprend une dizaine ou une douzaine de chapitres, rédigés par des scientifiques, puis relus, selon un processus assez long et très codifié, par la communauté scientifique, qui émet des remarques dont les rédacteurs tiennent compte - ou non - en motivant leur avis. Il est joint à chacun d’eux un résumé technique d’une cinquantaine de pages - au lieu de quelque neuf cents pour le docu-ment lui-même -, et un document plus concis dit « résumé pour décideurs ». Il existe également une synthèse et un résumé pour décideurs portant sur l’ensemble du rapport, c’est-à-dire sur les trois documents. Les gouvernements émettent également leurs propres observations, et c’est le résumé pour décideurs qui est soumis, ligne par ligne, à leur approbation. Nous sommes en train de rédiger le quatrième rapport, dont les deux premières phases sont déjà achevées et dont la publication est prévue pour 2007. Il y a de fortes chances que son approbation, pour la partie technique, ait lieu en France au début de 2007.
Le rôle du GIEC est d’établir un diagnostic. Il appartient ensuite aux politiques de prendre - ou non - les déci-sions, dans le cadre de la convention cadre des nations unies sur le changement climatique, qui a été approuvée à Rio de Janeiro en 1992. Une « conférence des parties » a lieu chaque année ; la plus connue est celle qui a adopté en 1997 le fameux « protocole de Kyoto » ; la prochaine aura lieu à Montréal. C’est grâce à cette confé-rence des parties qu’un véritable dialogue international a pu s’établir avec le GIEC.
L’effet de serre est un phénomène physique naturel, à la fois simple et bien connu. C’est aussi un phénomène bénéfique sans lequel la vie sur terre ne serait pas celle que nous connaissons. L’atmosphère est principalement constituée d’oxygène et d’azote, mais aussi d’autres composants qui « piègent » une partie du rayonnement solaire réfléchi et le transforment en chaleur : la vapeur d’eau, le gaz carbonique, le méthane, etc. Toutefois, parmi ces composants, certains, comme les chlorofluorocarbones, seraient en quantité insignifiante sans l’inter-vention de l’homme.
Le problème n’est donc pas l’effet de serre lui-même, mais son augmentation liée à l’activité humaine. Nous pouvons la mesurer de deux façons. D’abord grâce à des stations, réparties sur toute la planète, qui mesurent chaque jour la concentration de CO2, de méthane et d’oxyde d’azote sous des latitudes et longitudes diverses, nous permettant de connaître son évolution au cours des cinquante dernières années. Si l’on veut remonter plus loin dans le temps, on peut analyser la composition des bulles d’air emprisonnées dans les glaces polaires : c’est ainsi que nous savons que, depuis le début de l’ère industrielle, la concentration de CO2 est passée de 280 à 377 parties par million, soit une augmentation de 30 %, tandis que la concentration d’oxyde d’azote a augmenté de 15 % et que celle de méthane a été multipliée par 2,45.
Les analyses comparatives nous apportent la certitude que c’est essentiellement la combustion du charbon, du pétrole et du gaz naturel qui est à l’origine de l’augmentation observée pour le CO2. La quantité d’énergie dispo-nible pour « chauffer » les basses couches de l’atmosphère s’est accrue de 1 % depuis le début de l’ère indus-trielle, passant de 240 à 242,5 watts par mètre carré. Pour qu’il n’y ait pas réchauffement, il faudrait qu’il existe un mécanisme compensateur ; or tel n’est pas le cas, il y aurait plutôt, au contraire, un mécanisme amplifi-cateur, dans la mesure où le gaz carbonique, qui explique 60 % de cette augmentation - contre 20 % pour le méthane - reste en effet plus longtemps dans l’atmosphère.
Il s’ensuit que la stabilisation de l’effet de serre suppose la stabilisation du CO2. Actuellement, quelques 7 milliards de tonnes sont émises chaque année, soit plus d’une tonne par habitant ou six mètres cube de CO2 par jour et par habitant. Cette quantité, qui plus est, n’est pas répartie uniformément : elle est de 5 à 6 tonnes par habitant aux Etats-Unis, de 200 à 300 kilogrammes en Afrique. La France, avec 2 tonnes environ par habitant, est dans les « bons élèves » de sa catégorie, notamment grâce au nucléaire, qui représente les quatre cinquièmes de l’électricité produite.
Parmi les facteurs aggravants de l’effet de serre figure notamment la déforestation, car la végétation permet de « piéger » le CO2 : environ un quart du CO2 émis va dans l’océan, un quart dans la végétation, ce qui ralentit la progression de l’effet de serre. L’agriculture joue également un rôle aggravant, notamment à travers les rumi-nants, s’agissant de l’émission de méthane, et les pratiques agricoles, comme le recours intensif aux engrais qui dégage des oxydes d’azote.
En France, le CO2 contribue pour plus de 70 % à l’augmentation de l’effet de serre observée depuis dix ans. En 2001, quatre grands secteurs contribuaient pour un peu plus de 20 % chacun aux émissions : agriculture et sylviculture ; résidentiel et tertiaire ; transports ; industries manufacturières. Un recours accru à la biomasse et aux biocarburants est une des pistes à explorer et le monde agricole est d’ailleurs très sensibilisé à cette question.
Face à l’augmentation de l’effet de serre le climat se réchauffe, comme en témoigne l’évolution des courbes de température depuis un siècle et demi. L’année 1998 a été l’année la plus chaude de toute cette période, et neuf des dix dernières années - 1996 faisant exception - ont été plus chaudes que toutes celles qui les ont précédées. Nous pouvons aussi nous fonder sur d’autres indices, comme la fonte des glaces de mer, celle des glaciers, ou la température de surface des océans. Cela dit, une corrélation ne signifie pas forcément qu’il y ait un lien de cause à effet et l’on objecte souvent aux scientifiques qu’une augmentation d’un degré ou d’un degré et demi peut être due à des causes naturelles. On sait que l’Europe a connu de petites périodes glaciaires, notamment aux XVIIe et XVIIIe siècles, et aussi une période plus chaude qu’actuellement, au cours de laquelle les Vikings sont allés au Groenland. La réponse apportée par la communauté scientifique à la question du rôle joué par l’activité humaine dans le réchauffement du climat a beaucoup évolué et la position qu’elle a prise en 1995 a joué en faveur de la signature du protocole de Kyoto.
Le dernier rapport du GIEC, en 2001, a été encore plus affirmatif quant aux conséquences de l’activité humaine au cours du dernier demi-siècle et aucun élément n’est venu, depuis, le remettre en cause. Au contraire, les zones d’ombre ont plutôt été gommées. L’effet de serre continue d’augmenter, le climat de se réchauffer, même si la canicule de l’été 2003, où les températures ont été supérieures de trois à quatre degrés à la moyenne du XXe siècle, est un phénomène trop exceptionnel pour être expliqué par le seul changement climatique. Il en va de même, d’ailleurs, pour d’autres phénomènes extrêmes, comme les cyclones - qui ne sont pas plus fréquents, mais sont plus violents -, les sécheresses ou les inondations. Pour l’ensemble de ces phénomènes, le diagnostic scientifique n’est pas établi.
De nouveaux éléments ont permis de passer du « peut-être » de 1995 au « sans doute » de 2001. Le premier a été le progrès accompli dans la connaissance de la variabilité naturelle du climat, c’est-à-dire de son évolution sur plusieurs millénaires grâce à l’étude des arbres, des calottes glaciaires ou des coraux. Dans l’hémisphère nord, c’est au cours des huit dernières années que le réchauffement a été le plus important et c’est sans doute la décennie 1990 qui aura été la décennie la plus chaude. Mais pour dire cela nous nous fondons, non seulement sur l’évolution passée du climat mais aussi sur une modélisation, car il ne s’agit pas simplement d’extrapoler des tendances mais d’élaborer des modèles théoriques afin de les vérifier ensuite - ce que font, en France, Météo France et l’Institut Pierre Simon Laplace. Nous avons affiné ces modèles en couplant l’évolution des océans et celle de la végétation, nous les avons vérifiés par des recoupements avec les évolutions climatiques des cin-quante dernières années. Je précise qu’il faut tenir compte à la fois des forçages naturels - volcans, rayonne-ment solaire - et des forçages anthropiques, c’est-à-dire liés à l’activité humaine. Mais il en ressort dans tous les cas que l’augmentation de la température est bien liée à celle de l’effet de serre.
Je dois signaler au passage que cette modélisation nécessite d’importants moyens de calcul ; c’est même sans doute l’un des domaines de la recherche scientifique qui en nécessite le plus.
Il faut ensuite se faire une idée de ce que pourra être la composition de l’atmosphère au XXIe siècle, en faisant des prévisions quant aux émissions de CO2 et de méthane, en collaboration avec des économistes car tout cela dépend largement des évolutions démographiques, de la production d’énergie et de la façon d’utiliser celle-ci. C’est ainsi que nous avons échafaudé divers scénarios : B1, A2, etc.
Si aucune limite n’est mise à l’utilisation des combustibles fossiles, l’émission totale de CO2 pourrait passer, d’ici la fin du XXIe siècle, de 7 à 28 milliards de tonnes par an. Mais même le scénario le plus « vertueux », le plus optimiste, c’est-à-dire le maintien en moyenne des émissions à leur niveau actuel, aboutit à un doublement de la concentration à la fin du XXIe siècle, du fait que les rejets, même stabilisés, s’accumulent dans l’atmos-phère année après année. Et il n’y a guère de surprise : plus les émissions sont élevées, plus les concentrations le sont, plus l’effet de serre augmente. Et plus l’effet de serre augmente, plus l’atmosphère se réchauffe. Je parlais tout à l’heure d’une augmentation de 1 % du nombre de watts par mètre carré en cent cinquante ans ; elle pourrait bien être de 4 % au bout des cent ans qui viennent, ce qui est véritablement énorme.
Après l’élaboration de scénarios, l’étape suivante est celle des simulations à l’aide de modèles. Les résultats obtenus sont de deux types. Pour l’ensemble de la planète, l’augmentation moyenne de la température pourrait être comprise entre 1,4 et 5,8 degrés d’ici à 2100. Si la fourchette est aussi large, c’est d’abord parce que nos comportements sont susceptibles de varier, c’est aussi parce que le comportement du système climatique lui-même dépend de rétroactions qui ne sont pas aisées à prévoir : il est difficile, par exemple, de mesurer le rôle exact des nuages.
D’autre part, même en retenant une augmentation moyenne de trois degrés, correspondant à peu près au milieu de la fourchette, les disparités seraient très fortes entre les différentes zones du globe. L’Arctique, par exemple, se réchaufferait deux à trois fois plus que la moyenne, soit, toujours dans cette hypothèse, de huit à dix degrés. Quant aux océans, ils se réchaufferaient moins que les continents, et parmi ceux-ci l’Europe de l’Ouest connaî-trait le phénomène sous une forme amplifiée. Et n’oublions pas que trois degrés, c’est une variation représentant la moitié du changement global que la terre a connu à l’âge glaciaire, époque où la calotte polaire descendait jusqu’au nord de la France, et après laquelle il a tout de même fallu cinq mille ans pour que la température remonte de quatre ou cinq degrés.
D’une certaine façon, le monde politique a pris assez rapidement la mesure du phénomène. La convention cadre de Rio, dont le protocole de Kyoto n’est jamais que le bras séculier, a été signée par tous les pays, y compris les Etats-Unis, et son article 2 stipule qu’il faut « stabiliser les concentrations de gaz à l’effet de serre dans l’atmos-phère à un niveau qui empêche toute perturbation dangereuse du système climatique » et ce « dans un délai convenable pour que les écosystèmes puissent s’adapter naturellement aux changements, que la production alimentaire ne soit pas menacée et que le développement économique puisse se poursuivre d’une manière durable ».
Mais il faut bien comprendre que cela suppose un changement complet de notre façon de produire et d’utiliser l’énergie. Stabiliser les émissions de CO2 est impératif, ce qui ne veut pas dire qu’il ne faille pas stabiliser aussi les émissions de méthane. Mais si nous voulons limiter, à l’horizon de la fin du XXIe siècle, la concentration de CO2 à 450 parties par million au lieu de 380 actuellement - ce qui représenterait tout de même, en cent ans, une augmentation équivalente à celle observée au cours des deux siècles précédents -, il nous faudra redescendre à 2 ou 3 milliards de tonnes d’émissions par an, et probablement moins encore à long terme. L’objectif visé par l’Union européenne est d’éviter un réchauffement global de plus de deux degrés, ce qui passe par une stabilisa-tion à ce niveau de 450 parties par million. Le message, qui s’inscrit dans un discours scientifique, est bien passé, mais je me dis, quand je vois le Plan Climat, que c’est loin d’être gagné d’avance, et que diminuer les émissions d’un « facteur 4 » sera très difficile. Au demeurant, il n’y a pas hiatus entre le message de la commu-nauté scientifique et le message affiché des autorités politiques.
Il faut bien se pénétrer du caractère irréversible de l’évolution actuelle et abandonner l’idée que les générations à venir trouveront une solution pour réduire l’effet de serre. Nous faisons aujourd’hui le climat de demain et quand bien même nous arrêterions complètement les émissions, le XXIe siècle n’en connaîtrait pas moins un réchauffement équivalent à celui du XXe siècle, compte tenu de ce qui est déjà « emmagasiné », c’est-à-dire d’un demi à un degré. Les pays occidentaux sauront sans doute s’y adapter mais il serait égoïste de laisser le reste du monde aux prises avec un climat très difficile dans la deuxième moitié du XXIe siècle.
Cette inertie du système climatique est encore plus nette en ce qui concerne la contribution de la dilatation de l’océan à l’élévation du niveau de la mer, à raison de 20 à 30 centimètres par siècle, et ce inéluctablement. A cela risque de s’ajouter une fonte partielle du Groenland, qui porterait à trois ou quatre mètres l’élévation du niveau des mers au milieu du troisième millénaire. Il serait difficile, dans cette hypothèse, de préserver toute la prospérité des villes et des zones côtières et il serait temps que les architectes et urbanistes tiennent compte de ce risque.
Tous les gouvernements se sont mis d’accord sur un objectif de stabilisation de la concentration de CO2 à la fin du siècle, avec une décrue s’amorçant vers 2020-2030. Mais quand bien même nous y arriverions, la tempéra-ture continuerait de s’élever et le niveau des mers également. C’est un message que la communauté scientifique tient absolument à faire passer.
L’Europe pourra sans doute s’accommoder de deux degrés de plus ; reste qu’elle vivra sous un climat extrême-ment différent de celui que nous connaissons. Nous avons deux certitudes : premièrement, l’activité humaine contribue à l’augmentation de l’effet de serre et au réchauffement du climat ; deuxièmement, l’effet de serre va continuer de s’accroître. Mais nous avons aussi beaucoup d’incertitudes. La première tient à l’amplitude du changement climatique, qu’il s’agisse de la température ou du niveau de la mer. Une deuxième incertitude tient aux variations régionales - dont Serge Planton saura mieux vous parler. Nous sommes également dans l’incer-titude quant au régime des précipitations, aux extrêmes climatiques tels que tempêtes ou tornades, aux autres forçages climatiques, ainsi qu’aux rétroactions, notamment chimiques et aux couplages, par exemple avec la biosphère, l’océan. Enfin, il existe des surprises possibles, liées à l’inertie du système.
La France s’oriente sans doute vers des étés plus secs, avec moins de précipitations et plus d’évaporation, et une accélération de l’assèchement des sols, et vers des hivers plus humides. Au milieu du XXIe siècle, si nous ne modifions pas nos comportements, un été sur deux devrait être aussi chaud que l’été 2003, selon une étude de Greenpeace sur l’évolution du climat. En revanche, ce qu’on ne sait pas, c’est si les tempêtes, qui actuelle-ment ne sont pas plus fréquentes qu’avant, ne vont pas le devenir. Or la capacité destructrice des cyclones, on l’a vu notamment en Amérique ou aux Antilles, a été multipliée par deux en trente-cinq ans. Ce phénomène semble, pour une large part, imputable au réchauffement des océans dont se nourrissent les cyclones. On ignore également les interactions entre la chimie de l’atmosphère, les aérosols - artificiels ou naturels -, les nuages. En un an, la décomposition accélérée des matières organiques du sol, sous l’effet du réchauffement, a fait perdre à la Grande-Bretagne le bénéfice de tous les efforts qu’elle avait réalisés au cours des années précé-dentes. Et en Europe de l’Ouest, durant la canicule de l’été 2003, la végétation a trop souffert pour jouer son rôle de piège à carbone, de sorte qu’il y a eu accélération du réchauffement.
Parmi les surprises climatiques possibles figure l’éventuelle disparition du Gulf Stream, dont l’existence explique en grande partie le fait que le climat, à latitude égale, soit plus clément en Europe qu’en Amérique du Nord - qui subit il est vrai, inversement, l’influence de la Cordillère des Andes. Le mécanisme serait le suivant : si l’eau douce provenant de la fonte des calottes glaciaires adoucissait notablement l’océan en surface entre l’Equateur et la mer de Norvège, cette eau de surface risquerait d’être trop légère pour descendre au fond de l’océan comme actuellement, et la disparition de ce mouvement perpétuel entraînerait celle du Gulf Stream.
Ce qui est certain, c’est que si le climat est plus chaud de trois degrés, il y aura plus d’eau douce du fait de la fonte des glaces et du fait des précipitations, y compris, éventuellement au Groenland, ce qui accroît le risque d’adoucissement des eaux de l’Atlantique Nord et donc, de disparition du Gulf Stream au-delà du XXIe siècle. Dans cette hypothèse, le climat de nos régions reviendrait rapidement à des conditions proches du climat actuel, mais d’autres endroits de la planète, comme l’Afrique, connaîtraient un réchauffement bien supérieur, avec des effets profondément déstabilisateurs pour le choix entre choisir la façon de nous limiter ou nous la laisser imposer.