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Augustin l’Africain
Par Jérôme Anciberro

Le parcours de Saint Augustin ne se résume pas aux Confessions. Dans une nouvelle biographie, Catherine Salles, met l’accent sur l’africanité de l’évêque d’Hippone.

On le répète volontiers : Saint Augustin était africain. Spécialiste de l’antiquité romaine et du christianisme des premiers siècles, Catherine Salles a choisi de faire de cet ancrage géographique le fil d’une nouvelle biographie grand public de l’évêque d’Hippone (aujourd’hui Annaba, en Algérie), dont les œuvres continuent d’être lues et commentées bien au-delà des milieux chrétiens. On apprend d’ailleurs dans la bibliographie de fin d’ouvrage que la Revue des études augustiniennes recense chaque année environ quatre cents livres consacrées à l’auteur de la Cité de Dieu et des Confessions… Le témoignage très personnel laissé par Augustin dans ce dernier livre a évidemment beaucoup contribué à sa postérité. A tel point qu’on pourrait facilement l’y réduire, ce qui serait une erreur d’un point de vue littéraire, mais aussi biographique. Les Confessions ne sont pas une autobiographie mais le récit d’une conversion et une action de grâce à un Dieu qui l’aurait voulue. Mais l’exploration des « vastes palais de la mémoire » à laquelle se livre Augustin dans cet écrit ne va ensuite guère plus loin que sa trente-troisième année. Or notre homme a vécu une bonne quarantaine d’années de plus au cours desquelles il est devenu prêtre, évêque et surtout l’un des grands acteurs du combat intellectuel que l’Eglise livrait alors contre les hérésies (manichéisme, donatisme, arianisme, gnose…). Catherine Salles maîtrise parfaitement l’art de donner au lecteur des repères clairs et vivants sur le contexte dans lequel Augustin a vécu. Une passionnante description du système scolaire et universitaire romain permet par exemple de comprendre à la fois les difficultés rencontrées par Augustin dans son évolution intellectuelle, mais aussi à quel point cette formation classique essentiellement rhétorique reçue en Afrique lui aura été d’un grand secours dans sa carrière de polémiste. Les snobs ont beau se moquer de son terrible accent lors des quatre années qu’il passe en Italie comme professeur de rhétorique (à Rome et à Milan,), Augustin fera plus tard de son style – en chaire, malgré une voix qui porte peu, et dans ses écrits – un des grands atouts de sa pastorale, une tâche à laquelle il s’adonne sans s’économiser. C’est aussi le contexte religieux africain – et pas celui de l’Empire en général - qui a fait de lui l’impitoyable analyste des hérésies qui fascine encore les spécialistes. Manichéen résolu dans sa jeunesse, Augustin, devenu évêque catholique, livrera un combat sans pitié (intellectuellement parlant) au donatisme, hérésie rigoriste née sur le sol africain et qui s’était étendue au point de quasiment doubler administrativement l’Eglise catholique en Afrique romaine. Dans son prologue, Catherine Salles indique n’avoir eu pour ambition que de donner envie à ses lecteurs de se plonger dans les textes d’Augustin. Mission accomplie. On oubliera donc volontiers quelques bourdes comiques – il est question « d’indigènes musulmans » à l’époque des Flaviens (Ier siècle après J.C) ! – et cette manie qu’ont aujourd’hui les éditeurs de supprimer toutes les notes sous prétexte de ne pas effrayer des lecteurs qu’on imagine pourtant assez motivés pour se lancer dans une biographie d’un Père de l’Eglise comptant près de quatre-cent pages.

Article publié dans Témoignage Chrétien. Juin 2009

Catherine Salles, Saint Augustin, un destin africain, DDB, 392 p., 26 euros


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