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Eloge de l’Andouille, sous la direction de René Wiltold
La critique de Rémi Boyer

Ne voyez aucune allusion politique dans la parution de cet ouvrage magistral. Si c’était le cas, le pluriel se serait imposé dans le titre. Non, il s’agit de quelque chose de très sérieux, nous parlons d’art, d’art charcutier.

René Witold connaît son sujet. Il est membre de la Confrérie des Taste-Andouilles et Gandoyaux du Val d’Ajol. Ne vous y trompez pas, c’est tout à fait sérieux. Depuis Alfred Jarry (1873-1907) qui fut à l’origine de la ’Pataphysique et auteur du célèbre Ubu Roi [1], nul être sensé ne se laisserait aller à négliger l’andouille. En effet, pour Ubu, être roi, c’est déguster « plus d’andouille ».

Avec ce livre, mais avec d’autres également, notamment un étonnant Dictionnaire de domotique [2], René Witold flirte bel et bien avec la ’Pataphysique, cette « science des solutions imaginaires qui accorde symboliquement aux linéaments les propriétés des objets décrits par leur virtualité » [3].

D’ailleurs, René Witold nous conduit d’emblée au côté de Pantagruel. Dans le voyage carnavalesque du Quart Livre, Pantagruel rencontre non un roi mais la Reine des Andouilles. Rabelais, toujours lui, et toujours par l’andouille, nous entraîne encore dans les eaux de Mélusine, sur les chemins serpentins.

Déjà, l’étymologie devrait nous alerter. Le mot ancien andoille ou andoile nous est connu par le Roman de Renart qui voit le chat Tibert se venger du rusé Renart dans l’épisode des andouilles. Andoille vient du latin inductilia, inductilis, inducere avec l’idée d’introduire, de mettre dedans. Induct porte l’idée d’initier, introduire à une fonction, notamment ecclésiastique. L’andouille, imaginaire ou bien tangible, relève bien d’un sacerdoce.

Si, comme le temps, l’andouille est locale, il en existe de très nombreuses variétés, la plupart fumées, elle est avant tout une spécialité française et obéit désormais aux critères inscrits dans le Code des usages de la charcuterie, véritable bible du métier, d’où la nécessité des confréries pour assurer la pérennité d’un art ancestral et de ses savoirs. Notre civilisation est charcutière. On ne fait pas l’andouille de la même manière en Bretagne, en Normandie, en Flandres, en Ardennes, en Artois, dans les Vosges, en Bourgogne ou encore chez nos amis belges !

René Witold traque l’andouille, mythème inattendu mais puissant, dans la mythologie, dans l’héraldique, dans la théologie, dans la littérature, l’art, la sociologie et, littéralement… dans l’au-delà. Nous apprenons beaucoup, sur l’andouille certes, mais aussi sur nous-mêmes. Avant de vous marier, homme ou femme, lisez ce livre. Il reste conseillé après le mariage. C’est un « divin remède » apprend-on.

Eloge de l’Andouille

René Witold

Editions du Cosmogone, 6 rue Salomon Reinach, 69007 Lyon – www.cosmogone.com

Notes :

[1Jarry, Alfred. Ubu roi. Pièce en cinq actes, représentée pour la première fois en 1896. La pièce qui inaugure le cycle Ubu, fut publiée au Mercure de France en 1895.

[2Zaniewicki, Witold (dir). Dictionnaire de domotique. Éditions Eyrolles, Paris, 1990.

[3Jarry, Alfred. Gestes et opinions du docteur Faustroll, pataphysicien. Éditions Fasquelle, Paris, 1911.


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