Une fois n’est pas coutume : je vais commencer par la préface. « Quand arrivent de nouveaux poèmes de François de Cornière, on a aussitôt envie de prendre des nouvelles de l’auteur de Nageurs du petit matin. Il a la même façon de raconter des petites choses qui forment son quotidien, et le nôtre pareillement, de petites choses qui recouvrent parfois des continents émotionnels ». Et je continue par la quatrième de couverture où François de Cornière prend la parole : « Je poursuis ici le parcours qui a toujours été le mien : celui de la vie, traversée par des instants notés au vol parce qu’ils m’ont touché (un mot ou deux, une phrase, une question …). Et ces instants dans mes poèmes, à la façon d’une couturière, (…) je cherche à les « reprendre », sans trop les « retoucher »…
Tout est dit de ce qu’il y a à comprendre dans ces poèmes ! Je relève cette strophe qui me semble révélatrice de l’ensemble du recueil et de la simplicité et de la force à dire les choses : « Les clés avaient fait toc / au fond de la boîte. / Impossible de revenir en arrière maintenant / impossible de remonter l’escalier / qui menait au jardin / de notre amour d’hier » ( p 27). Page 59, ces mots sont significatifs : « L’expression m’avait accompagné / pendant que je marchais / pour aller voir la mer / Perdre quelqu’un ». La seule limite, c’est quand on ne partage pas les mêmes moments, mais c’est rare… Ainsi avec ce Cd de Keith Jarrett (p 51).
Je me souviens de François et Sophie traversant la France pour aller dans leur maison de campagne (que je me plais à imaginer modeste car héritée des grands-parents) pour se livrer à des parties de pêche, maintenant que Sophie s’en est allée ! Et c’est toujours la même émotion qui me saisit, qui me touche énormément, « en arrière-fond de mon poème » (p 81). J’aime ces vers : « Je les avais tellement entendus prononcés / avant la mort de mon amour ! » (p 87). J’aime revoir le poète entre les mots : « Est-ce que c’est le souvenir / qui fabrique le souvenir / ou le poème qui fabrique le souvenir ? » (p 108). Ou « je penche toujours / du côté où j’ai un poids » (p 126), « Je m’étais dit qu’écrire ainsi de la poésie / sans ce qui fait la poésie / serait un sacré beau défi » (p160). Ce sera le mot de la fin !
François de Cornière, « ça tient à quoi ? », Le Castor Astral, 200 pages, 13 euros.