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La Russie de demain à la lumière de son histoire littéraire, de Gilles Cosson
La critique de Rémi Boyer

Au-dessus des partis pris et des positionnements crispés, Gilles Cosson puise dans l’histoire de la littérature russe pour chercher des voies d’espérance au milieu du chaos actuel.

Il remarque tout d’abord que « Dans tous les pays du monde, la littérature a anticipé, relaté, rejeté, amplifié toutes les tendances de la société du moment, et ce y compris dans l’ordre politique, les deux domaines s’interpénétrant, se fertilisant et se détestant simultanément. »

Prenant en compte les tensions, tantôt créatrices tantôt destructrices, à l’œuvre dans la littérature russe, entre libéralisme démocratique et panslavisme militant ou encore entre rationalisme et intuition mystique, Gilles Cosson développe sa pensée en trois temps : « l’examen des origines et composantes romanesques » de la littérature russe, puis comment « la société russe d’aujourd’hui est le reflet de cette littérature, présente et passée » pour enfin rechercher de possibles évolutions.

Il commence par poser la question du « rôle de la langue russe comme facteur d’intégration administrative et de richesse culturelle ». Il remarque le rôle politique de la langue de culture qui est aussi langue administrative. Les cas de la Belgique, de la Suisse, de la Catalogne, du Québec ou de la France montrent comment « la langue du pays dominant » cherche « à s’imposer à tous contre les velléités régionales d’indépendances ». Dans une Ukraine écartelée par l’histoire, la volonté de russification est aussi passée par la langue : « Le tsarisme comme le communisme ont toujours tenté de réduire par la force ces revendications culturelles en imposant l’usage de la langue russe. »

Dans un deuxième temps, Gilles Cosson dégage quelques caractéristiques de la littérature russe à travers ses grands noms : Tourgueniev, Pouchkine, Dostoïevski, Gogol, Tchekov… comme « l’idéalisation des gens simples faisant preuve de résistance face à la domination des maîtres, et plus encore face à la brutalité de la répression ».

La révolution russe va profondément changer les règles. La censure et l’autoritarisme conduisent à l’exil ou au conformisme. Quelques auteurs comme Boulgakov persistent à dénoncer les abus du pouvoir et en subissent les conséquences.

L’espace littéraire ne se libèrera, très progressivement et partiellement qu’après le deuxième conflit mondial jusqu’à la chute du communisme qui inaugure une ère de liberté littéraire, de nouveau perdue sous l’action absolutiste de Vladimir Poutine.

La littérature russe a perdu aujourd’hui de son influence sur l’évolution politique et Gilles Cosson s’interroge sur l’avenir des intellectuels et écrivains russes. Face aux mutations géopolitiques, stratégiques et technologiques que nous traversons, « le rôle des intellectuels, dit-il, ne devrait-il pas être d’insister, sans renoncer à la qualité littéraire de leurs œuvres, sur la nécessité d’ouverture de la Russie à un cadre plus large ». Education, pluralisme politique, développement de l’esprit critique, multiculturalisme sont quelques-unes des pistes de réflexion proposées pour l’intérêt de tous, peuple et pouvoir.

La Russie de demain à la lumière de son histoire littéraire
Les Editions de Paris – Max Chaleil, 54 rue des Saints-Pères, 75007 Paris – https://leseditionsdeparis.com/


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