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Le genre à l’école : l’Appel de Strasbourg
Un article de Sylvestre Huet sur le blog Sciences Libération

La polémique sur le genre à l’école se poursuit. Lancée par des militants d’extrême-droite, rejoints parfois par des personnalités qui s’étaient auparavant engagées à gauche comme Farida Belghoul (quelle dérive si l’on songe aux idées qu’elle défendait lorsqu’elle étudiait à Paris-1 Tolbiac...), elle accuse les enseignants de faire « perdre leurs repères » aux enfants. Fariboles, mais dangereuses dès lors qu’elles sont reprises par des autorités morales ou politiques —voir l’ambiguité de discours de droite.

Or, que disent les universitaires sur le sujet ? Voici un court mais clair texte signé d’Enseignants-chercheurs et de chercheurs de l’Université de Strasbourg, pour qui, manifestement, la coupe est pleine. Ils me l’ont envoyé par courriel ce matin. Et même si ce... genre de sujet n’est pas au cœur des thématiques de ce blog, je le publie volontiers. Moi aussi, je trouve que « passées les bornes, il n’y a plus de limites », comme disait une émission à la radio. Ne prenez pas nos enfants en otages de vos calculs politiciens, et laissez nos enseignants apprendre le respect, l’égalité des sexes et le mal que des siècles de stéréotypes ont fait... surtout aux filles.

Voici ce texte et ses cent signataires :

POUR EN FINIR AVEC LES IDÉES REÇUES

LES ÉTUDES DE GENRE, LA RECHERCHE ET L’ÉDUCATION : LA BONNE RENCONTRE

Des enseignants et chercheurs de l’Université de Strasbourg réagissent.

Depuis quelques jours, les élèves et les parents d’élèves sont harcelés de mails et de SMS provenant d’associations extrémistes qui propagent la rumeur selon laquelle, parce que « le genre » est introduit dans les programmes scolaires, leurs enfants seraient en danger à l’école. Non seulement cette manœuvre de déstabilisation des parents est révoltante (les enfants ont été privés d’école) mais de plus cette rumeur est totalement mensongère.

NON, les enfants ne sont pas en danger. Non, il n’y aura pas de projection de films « sexuels » à l’école, et les garçons ne seront pas transformés en filles (et inversement). NON, la prétendue « théorie du genre » n’existe pas. Le genre est simplement un concept pour penser des réalités objectives. On n’est pas homme ou femme de la même manière au moyen-­âge et aujourd’hui. On n’est pas homme ou femme de la même manière en Afrique, en Asie, dans le monde arabe, en Suède, en France ou en Italie. On n’est pas homme ou femme de la même manière selon qu’on est cadre ou ouvrier. Le genre est un outil que les scientifiques utilisent pour penser et analyser ces différences.

OUI, les programmes scolaires invitent à réfléchir sur les stéréotypes de sexe, car l’école, le collège, le lycée sont le lieu où les enseignants promeuvent l’égalité et le respect mutuel, où les enfants apprennent le respect des différences (culturelle, sexuelle, religieuse).

OUI, l’école est le lieu où l’on permet à chacun, par les cours de français, d’histoire, de SVT, d’éducation civique, d’éducation physique, de réfléchir sur les conséquences néfastes des idées reçues et d’interroger certains préjugés, ceux qui ont fait que pendant des siècles un protestant ne se mariait pas avec une catholique, ceux qui font que l’on insulte encore aujourd’hui une ministre à cause de sa couleur de peau, ceux qui font que des petits garçons sont malmenés aux cris de « pédés » dans la cour de l’école, ceux qui font que Matteo n’osera jamais dire qu’il est élevé et aimé par deux mamans, ceux qui font qu’Alice veut mourir car on la traite de garçon manqué, ceux qui créent la haine et la discorde.

Les études de genre recouvrent un champ scientifique soutenu par le Ministère de la recherche et de l’enseignement supérieur et le CNRS, et elles ont des utilités nombreuses dans l’éducation et la lutte contre les discriminations : ces études et ces travaux existent à l’université depuis longtemps. L’Académie de Strasbourg organise une journée de formation continue sur cette question, à destination des professeurs d’histoire géographie et, à l’Université de Strasbourg, un cours d’histoire des femmes et du genre est proposé dans la licence de Sciences historiques, tout comme, par exemple, plusieurs cours de sociologie, de sciences de l’éducation, d’anthropologie portent sur le genre. Des séances de sensibilisation aux questions d’égalité entre les sexes sont intégrées dans le parcours de formation des enseignants du primaire et du secondaire.

« Vati liest die Zeitung im Wohnzimmer. Mutti ist in der Küche. » (Papa lit le journal dans le salon, Maman est dans la cuisine). Voilà comment les petits Alsaciens apprenaient l’allemand, à travers les aventures de Rolf et Gisela, dans les années 1980.

Réfléchir sur le genre, c’est réfléchir sur les effets de ce type de messages. En permettant aux élèves de se demander pourquoi les princesses ne pourraient pas aussi sauver les princes, en montrant que, selon les lieux et les époques, les rôles des hommes et des femmes ont varié et que l’amour a des formes multiples, les chercheurs, les enseignants et les professeurs des écoles permettent aux enfants, citoyens et citoyennes de demain, de construire un monde plus égalitaire et plus harmonieux.

Les signataires

1. Sandra BOEHRINGER, maîtresse de conférences, Faculté des Sciences historiques, Université de Strasbourg 2. Philippe CLERMONT, maître de conférences, École Supérieure du Professorat et de l’Éducation, Université de Strasbourg 3. Jean-­‐Pascal GAY, maître de conférences, Faculté des Sciences historiques, Université de Strasbourg 4. Estelle FERRARESE, professeure, Faculté des Sciences Sociales, Université de Strasbourg 5. Céline PETROVIC, chargée d’enseignement, Faculté des Sciences de l’Éducation, Université de Strasbourg 6. Sylvie MONCHATRE, maître de conférences, Faculté des Sciences sociales, Université de Strasbourg 7. Frédérique BERROD, professeure de droit, spécialiste de droit de l’Union Européenne, Institut d’Étude politique, Université de Strasbourg 8. Claire METZ, maître de conférences en psychologie clinique, École Supérieure du Professorat et de l’Éducation, Université de Strasbourg 9. Thomas BRUNNER, professeur agrégé, Faculté de Sciences historiques, Université de Strasbourg 10. Anne THEVENOT, professeur en psychologie clinique, Faculté de Psychologie, Université de Strasbourg 11. Alexandre SUMPF, maître de conférences, Faculté des Sciences historiques, Université de Strasbourg 12. Odile SCHNEIDER-­‐MIZONY, professeure de linguistique, Faculté des langues et cultures étrangères, Université de Strasbourg 13. Corinne GRENOUILLET, maître de conférences, Faculté des Lettres, Université de Strasbourg 14. Dominique SCHLAEFLI, Ingénieur de recherches, Service Formation Continue, Université de Strasbourg 15. Loup BERNARD, maître de conférences et archéologue, Faculté des Sciences historiques, Université de Strasbourg 16. Isabelle LABOULAIS, professeure, Faculté des Sciences historiques, Université de Strasbourg 17. Céline CLÉMENT, professeure en Psychologie et Sciences de l’Éducation, École Supérieure du Professorat et de l’Éducation, Université de Strasbourg 18. Michèle AUDIN, professeure, UFR mathématiques et informatique, Université de Strasbourg 3 19. Florence LECOMTE, chargée de recherche, Institut de Recherche Mathématique Avancée, CNRS et Université de Strasbourg 20. Fabienne MULLER, maître de conférences, Faculté de droit / Institut du Travail, Université de Strasbourg 21. Michel KOEBEL, maître de conférences, Faculté des sciences du sport, Université de Strasbourg 22. François BONNAREL, Ingénieur de recherche CNRS, Unité mixte de recherche CNRS/Université de Strasbourg "Observatoire astronomique de Strasbourg" 23. Nicole POTEAUX, professeure émérite de sciences de l’éducation, faculté de Sciences de l’éducation, Université de Strasbourg 24. Hervé POLESI, maître de conférences associé, Faculté des Sciences Sociales, Université de Strasbourg 25. Audrey KICHELEWSKI, maîtresse de conférences en histoire contemporaine, Faculté des Sciences historiques, Université de Strasbourg 26. Mélanie JACQUOT, maîtresse de conférence en psychologie clinique et psychopathologie, Faculté de psychologie, Université de Strasbourg. 27. Corine PENCENAT, maître de conférences, Faculté des Arts, Université de Strasbourg 28. Nicolas POULIN, Ingénieur de recherche, UFR de mathématiques et d’informatique, Université de Strasbourg 29. Roland PFEFFERKORN, professeur, Faculté des Sciences Sociales, Université de Strasbourg 30. Patricia LEGOUGE, chargée d’enseignement, Faculté des Sciences Sociales, Université de Strasbourg 31. Anne MASSERAN, maître de conférence en sciences de l’information et de la communication, ITIRI-­‐LSHA, Université de Strasbourg 32. Éric TISSERAND, professeur agrégé, École Supérieure du Professorat et de l’Éducation, Université de Strasbourg 33. Valérie LOZAC’H, maîtresse de conférences, Institut d’Études Politiques, Université de Strasbourg 34. Vincent DUBOIS, professeur de science politique, Institut d’Études Politiques, Université de Strasbourg 35. Sébastien MICHON, chargé de recherche CNRS, Laboratoire SAGE/Université de Strasbourg 36. Pascal MAILLARD, professeur agrégé, Faculté des lettres, Université de Strasbourg 37. Isabelle HAJEK, maître de conférences, Faculté des Sciences sociales, Université de Strasbourg 38. Thierry RAMADIER, directeur de recherche, Laboratoire Sociétés, Acteurs, Gouvernement en Europe, CNRS et Université de Strasbourg 39. Ioana CIRSTOCEA, chargée de recherche, CNRS, UMR 7363 SAGE, Université de Strasbourg 40. Philippe CHAVOT, maître de conférences, Faculté de Sciences de l’Éducation, Université de Strasbourg 41. Marie AUGIER, agrégée, chargée de cours, Faculté des Sciences historiques, Université de Strasbourg 42. Patricia CAILLÉ, maîtresse de conférences, Département Information-­‐ Communication, IUT Robert Schuman, Université de Strasbourg 43. Françoise OLIVIER-­‐UTARD, maître de conférences, retraitée, Faculté des Sciences Économiques et de Gestion, Université de Strasbourg 4 44. Éric FRIES GUGGENHEIM, maître de conférences, Faculté des Sciences Économiques et de Gestion, Université de Strasbourg 45. Agnès DUCLOS, technicienne de recherche et de formation, Institut d’Études Politiques, Université de Strasbourg 46. Anne-­‐Véronique AUZET, professeure, Faculté de Géographie et d’Aménagement, Université de Strasbourg 47. Magdaléna HADJIISKY, maître de conférences, Institut d’Etudes Politiques, Université de Strasbourg 48. Yasmina CHADLI, agent administratif, IUT Louis Pasteur, Université de Strasbourg 49. Hélène MICHEL, professeure de science politique, Institut d’Etudes Politiques, Université de Strasbourg 50. Julien GOSSA, maître de conférences, Département Informatique, IUT Robert Schuman, Université de Strasbourg 51. Jay ROWELL, directeur de recherche CNRS, Université de Strasbourg 52. Jean-­‐Pierre DJUKIC, Directeur de Recherche au CNRS, Institut de Chimie de Strasbourg, Université de Strasbourg 53. Brigitte FICHET, maître de conférences honoraire, Faculté des Sciences Sociales, Université de Strasbourg 54. Anne-­‐Sophie LAMINE, professeure, Faculté des Sciences Sociales, Université de Strasbourg 55. Nicolas BELORGEY, chargé de recherche, CNRS et Université de Strasbourg 56. Gaelle LACAZE, maitre de conférences en ethnologie, Faculté des Sciences Sociales, Université de Strasbourg 57. Catherine DELCROIX, professeure, Faculté des Sciences Sociales, Université de Strasbourg 58. Vincent BEAL, maître de conférences, Faculté des Sciences Sociales, Université de Strasbourg 59. Nicolas CAUCHI-­‐DUVAL, maître de conférences, Faculté des Sciences Sociales, Université de Strasbourg 60. Julie SEDEL, maître de conférences en Sociologie et en Science Politique, IUT Robert Schuman, Université de Strasbourg 61. Niilo KAUPPI, directeur de recherche au CNRS, Laboratoire SAGE, Université de Strasbourg 62. Solenne JOUANNEAU, maître de conférences en science politique, IEP de Strasbourg, Université de Strasbourg 63. Jean-­‐Yves BART, traducteur, Projex Europe, Université de Strasbourg 64. Jacques HAIECH, professeur de biotechnologie, Faculté de Pharmacie, Université de Strasbourg 65. Michelle POLOCE, certifiée, IUT Louis Pasteur, Université de Strasbourg 66. Michaël GUTNIC, maître de conférences, UFR Mathématique et Informatique, Université de Strasbourg 67. David BOUSQUET, professeur agrégé, Centres de Ressources de Langues, Université de Strasbourg 68. Christian de MONTLIBERT, professeur émérite, Faculté des Sciences Sociales, Université de Strasbourg 69. Luana QUATTROCELLI, maître de conférences, Faculté des Lettres, Université de Strasbourg 70. KEIM, Wiebke, chargée de recherche, CNRS, UMR 7363 SAGE, Université de Strasbourg 5 71. Estelle CZERNY, ingénieure d’études, Université de Strasbourg 72. Antoine AUFRAY, maître de conférences, faculté des langues et cultures étrangères, Université de Strasbourg 73. Laurence BUCHHOLZER, maître de conférences, faculté des sciences historiques, Université de Strasbourg 74. Marine de LASSALLE, maîtresse de conférence, IEP de Strasbourg, Université de Strasbourg 75. Jean-­‐Philippe HEURTIN, professeur en science politique, Institut d’Etudes Politiques, Université de Strasbourg 76. Bernard WOEHL, Doyen de la Faculté des Sciences Sociales, 77. Katerina NOVAKOVA, chargée d’enseignement (agent contractuel d’enseignement), Faculté des Langues et des Cultures étrangères, UDS 78. Josiane NERVI-­‐GASPARINI, maître de conférences, Directrice de l’Institut de Recherche sur l’Enseignement des Mathématiques (IREM), Université de Strasbourg 79. William GASPARINI, professeur, Faculté des sciences du sport, Université de Strasbourg 80. Elisabeth LAMBERT ABDELGAWAD, directrice de recherche au CNRS, SAGE, Université de Strasbourg 81. Philippe WALTER, Directeur de Recherche, CNRS 82. Christine HUYGHE, chargée de recherche au CNRS, UFR de mathématiques et informatique, Université de Strasbourg 83. Patricia ZANDER, maître de conférences géographie/aménagement, Faculté de géographie et d’aménagement, Université de Strasbourg 84. Daniel GRUCKER, professeur de biophysique, faculté de médecine, Université de Strasbourg 85. Vincent BALNAT, maître de conférences, Faculté des Langues et Cultures étrangères, Université de Strasbourg 86. Thierry REVOL, professeur, Faculté des Lettres, Université de Strasbourg 87. Agnès CLERC-­‐RENAUD, Maître de conférences en ethnologie, Faculté des Sciences sociales, Université de Strasbourg 88. Alice DEBAUCHE, maîtresse de conférence, Faculté des Sciences Sociales, Université de Strasbourg 89. Maurice BLANC, Professeur Émérite, Faculté des Sciences Sociales, Université de Strasbourg 90. François STEUDLER, professeur émérite, Faculté des Sciences Sociales, Université de Strasbourg 91. Françoise STEUDLER-­‐DELAHERCHE, professeur agrégée, Faculté des Sciences Historiques, Université de Strasbourg 92. Hervé BERVILLER, maître de conférences, UFR Physique et Ingénierie, Université de Strasbourg 93. Jean-­‐Jacques SCHWIEN, maître de conférences et archéologue, Faculté des Sciences Historiques, Université de Strasbourg

Article mis en ligne le 30 janvier 2014 sur le blog Sciences Libération
http://sciences.blogs.liberation.fr/home/2014/01/le-genre-%C3%A0-l%C3%A9cole-lappel-de-strasbourg.html


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