Les « religions du Livre » sont, dans l’ordre d’apparition :
1. La religion hébraïque ou judaïsme.
2. Le christianisme.
3. L’islam.
Un article sera consacré à chacune de ces religions pour montrer en quoi elles sont systématiquement hostiles à la femme. Le premier article, ci-après, se rapporte au judaïsme.
1 - Le judaïsme contre la femme
Et je trouve plus amère que la mort la femme, parce qu’elle est un traquenard, que son cœur est un piège et que ses bras sont des liens (Ecclésiaste, VII, 26).
Les religions traitent systématiquement les femmes comme des êtres inférieurs. Les exceptions sont rares. Cela vaut tout spécialement pour les trois monothéismes, l’islam étant indéniablement, aujourd’hui, en tête du palmarès.
Le Livre sacré du judaïsme est la Bible hébraïque parfois appelée Tora (écrit aussi Thora ou Torah). L’ensemble des commentaires de ce texte sacré fait par des rabbins au cours des siècles constitue le Talmud. Les tenants de cette religion (dite aussi religion hébraïque par référence au peuple hébreu dont elle émane) sont les juifs (sans majuscule) ou les israélites. Le mot Tora peut ne désigner que les cinq premiers livres de la Bible (Pentateuque) ou l’ensemble de la Bible juive ou encore l’ensemble constitué par cette Bible et les commentaires qui ont suivi, c’est-à-dire le Talmud.
Le judaïsme n’est pas spécialement favorable aux femmes. Les interventions des juifs libéraux pour prouver le contraire montrent que si une modeste évolution se constate, elle est récente et qu’il reste encore beaucoup à faire.
La démonstration sur le caractère peu féministe de cette religion pourrait se contenter de citer la prière du matin. L’homme dit : « Béni soit Dieu notre Seigneur et le Seigneur de tous les mondes qu’il ne m’ait pas fait femme. » Dans une autre traduction, cela donne : « Sois béni, Seigneur notre Dieu, Roi de l’Univers, qui ne m’a pas fait femme. » Et la pauvre femme, qui n’a pas le bonheur d’être du bon sexe, que peut-elle bien dire ? : « Béni soit le Seigneur qu’il m’ait créé selon sa volonté. »
Soyons plus précis. Voici ce que dit un traité du Talmud (Menakhoth, Sacrifice des farines) : « Tout individu de sexe masculin est tenu de prononcer trois bénédictions : pour remercier Dieu d’avoir fait de lui un Israélite, de ne pas l’avoir fait naître femme, de ne pas avoir fait de lui un rustre. » A. Cohen, qui cite ce texte, dit que dans la recension suivie par le rituel des prières, la bénédiction prend une autre forme : « Qui n’a fait de moi ni un païen, ni un esclave, ni une femme. »
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Dans la Torah, livre sacré des juifs, la femme, responsable de tous les malheurs de l’humanité, souvent impure, passant après l’homme, jamais traitée sur un pied d’égalité, avant tout destinée à faire des enfants pour permettre à son peuple de se perpétuer, écartée de toutes les grandes questions, ne figurant même pas dans de nombreuses généalogies, n’ayant aucun droit dans le code de Solon, comptabilisée avec le bétail, n’est jamais considérée pour elle-même, en tant que personne.
Les choses ont mal commencé dans le Jardin d’Eden. Le serpent s’adresse à Ève pour lui faire manger le fruit de l’arbre de la connaissance. Elle cède et conduit Adam à faire de même. Dieu la punit :
« À la femme il dit : “Je vais multiplier tes souffrances et tes grossesses : c’est dans les souffrances que tu enfanteras des fils. Ton élan sera vers ton mari et, lui, il te dominera” » (Genèse, III, 16).
Nous remarquons que la multiplicité des grossesses est présentée comme incluse dans la malédiction. Il en va de même pour les souffrances liées à l’accouchement. Un traditionaliste devra donc proscrire la contraception, à plus forte raison l’avortement et bien sûr l’anesthésie ainsi que les autres moyens destinés à diminuer la souffrance de l’accouchement.
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La femme est impure quand elle a ses règles et après l’accouchement. Et tout ce qu’elle touche est impur. « Que s’il y a quelque chose sur la couche ou sur l’objet sur lequel elle était assise, en y touchant on sera impur jusqu’au soir » (Lévitique, XV, 24). Quand elle a enfanté un mâle, la souillure dure sept jours. Cette durée est doublée s’il s’agit d’une fille.
Outre le fait que ce peuple semble passer son temps à faire des barbecues à titre de purification, deux remarques seulement. Cette façon de lier l’impureté à l’accouchement est paradoxale pour une civilisation accordant une très grande importance à la fécondité. Cependant, et plus encore pour le sang des menstruations, ces pratiques se retrouvent dans de nombreuses sociétés primitives. Chez les Dogons, par exemple, la femme reste enfermée durant la période de ses règles.
D’une manière plus générale, la priorité accordée aux garçons est manifeste. Jusqu’à Abraham, dans les généalogies, il n’est même pas parlé des filles. On leur demande d’abord et avant tout de procréer afin de conserver la lignée et il arrive qu’elles n’y rechignent pas. Loth étant menacé de mourir sans descendance (masculine, la seule qui compte), ses filles décident de l’enivrer et de se faire engrosser par lui. La Genèse raconte longuement l’opération (XIX, 30-38). « Allons ! Abreuvons de vin notre père, couchons avec lui et faisons survivre la race par notre père ! » L’aînée commence. La cadette profite d’une autre cuite pour lui emboîter le pas.
Dans le Lévitique, la femme, quand est évoqué le patrimoine du père ou du mari, est englobée avec le bétail. Le patriarche est d’ailleurs polygame pour être sûr quant à la lignée. Jacob a quatre femmes. Abraham, sa femme étant stérile, comme Marx et Zola, fait un enfant à sa servante. Sur intervention divine, sa femme Sarah étant devenue enceinte à soixante-dix ans, il renvoie, après la naissance du fils légitime (Isaac), le bâtard (Ismaël) et sa mère. Selon la Bible, il serait à l’origine des Bédouins d’Arabie (et donc, après bien des siècles, à l’origine de l’islam). À la mort de son mari, la femme est automatiquement transférée au frère du mari (lévirat).
L’Ecclésisatique, qui se trouve à la fin de la Bible, rappelle ce qui est dit au début : c’est de la femme que vient tout le mal : « C’est par la femme qu’a commencé le péché. C’est à cause d’elle que nous mourrons tous » (XXV, 24).
Il faut, en particulier, se méfier des jolies femmes :
« Détourne les yeux de la jolie femme,
Ne fixe pas ton regard sur la beauté étrangère.
Par la beauté des femmes beaucoup ont été perdus,
Auprès d’elles, l’amour s’enflamme comme un feu »
(Ecclésiastique, IX, 8).
Il est d’autres endroits où la beauté féminine est vantée, mais à la maison, et seulement pour le bonheur du mari. La femme qui ne donne pas satisfaction peut être répudiée (XXV, 26) : « Si elle ne marche pas selon ta direction, de ta chair retranche-la ! »
Toujours, dans l’Ecclésiastique, se rencontrent des textes assez durs comme celui-ci : « Au milieu des femmes ne t’assieds pas. Car des vêtements sort la teigne, De la femme sort la méchanceté féminine » (XLII, 12-13).
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Les textes sont là. Documents datés, correspondant à une civilisation vieille de plusieurs milliers d’années, certes. Tout le monde en convient. Mais que l’on ne présente pas la Bible comme un texte intangible dans lequel Dieu a tout prévu et y compris la façon de tailler sa barbe ou de tracer des frontières.
Devant une telle accumulation de textes probants (qui pourrait encore être étoffée), un théologien souhaitant montrer que le féminisme était déjà en germe dans l’Ancien Testament risquerait de se décourager. Pourtant, même quand ils ne citent que les textes qui les arrangent et en les interprétant à la limite du canular, leur entreprise tombe à plat. Le judaïsme, comme pratiquement toutes les religions, est bien contre la femme. L’islam, qui se situe dans le prolongement de la Torah, a maintenu un héritage.
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Les choses ont évolué bien sûr. Pourtant quand une théologienne canadienne s’efforce faire ressortir le caractère féministe de la Torah, sa démonstration se retourne entièrement contre elle. Le statut de la femme juive lui paraît privilégié par le fait qu’elle met au monde des enfants et qu’ensuite, parce que l’enfant vit ses premières années près d’elle, elle l’imprègne de l’esprit religieux préparant ainsi le travail des rabbins.
« Les femmes restent au centre du judaïsme : c’est elles qui mettent au monde, qui donnent son identité religieuse à l’enfant en maintenant un environnement propice à la vie religieuse au sein de leur foyer. C’est encore elles qui servent de lien entre le domaine public et privé. Bref, comme aux temps bibliques, c’est sur elles que repose la vie du judaïsme. »
Cette façon d’envisager le féminisme, dans laquelle la femme n’est pas considérée comme une personne, une fin, mais uniquement comme un moyen au service d’une religion, a au moins le mérite de l’originalité.
Pour les exercices de prestidigitation des théologiens ou théologiennes : http://pages.ca.inter-net/csrm/nd126.rati.html. Voir aussi, sur www. jafi.org, une autre démonstration paradoxale, Grâce à ses talents amoureux, Esther sauve son peuple et fait massacrer ses ennemis par milliers, femmes et enfants compris. Les citations sont extraites de l’Ancien testament dans la collection de la Pléiade.
COHEN, A., Le Talmud, Petite Bibliothèque Payot, 2002 (éditions précédentes, 1950, 1975, 1986), traduit de l’anglais par Jacques Marty (titre original : Everyman’s Talmud).
Lire également sur le site, de Paul Désalmand : Le christianisme contre la femme, l’Islam, Un athée de choc : le curé Meslier